À l’initiative de l’Union européenne et du ministère pour le Développement administratif, et dans le cadre du programme « Afkar 2 », l’Association libanaise pour la démocratie des élections (LADE) a organisé hier un atelier de travail visant à former les journalistes à la couverture médiatique des élections.
La LADE espère à terme, et après plusieurs ateliers du même type organisés un peu partout sur le territoire libanais, parvenir à mettre en place un pacte d’honneur médiatique qui pourrait être respecté par tous les journalistes, en toutes circonstances et quel que soit le sujet traité.
Cet atelier avait pour but de familiariser les membres de la presse écrite à l’importance du rôle joué par les médias dans la consolidation de la démocratie parlementaire. Ainsi, en assurant une couverture neutre et non biaisée de l’information, en relevant les irrégularités notées dans et autour des bureaux électoraux, les journalistes peuvent et doivent jouer le rôle d’observateurs neutres.
Animée par Abbas Abou Zeid et Vicky Hokayem, tous deux membres de la LADE, la séance de travail a été amorcée par une synthèse du projet de loi électorale législative élaborée par la commission Boutros. Abbas Abou Zeid a fait valoir que, dans ce domaine, « les lois jordaniennes et marocaines sont beaucoup plus avancées que la loi libanaise actuelle, même par rapport au projet de loi prévu par la commission Boutros ». Mettant en exergue les « plus » apportés par le projet de cette commission en matière de réglementation de l’opération électorale, M. Abou Zeid a relevé qu’un quota féminin a été instauré à hauteur de 30 % des candidatures sur une même liste électorale. Il a aussi mis en avant la mise en place d’une commission indépendante chargée de surveiller le déroulement des élections, qui est un point crucial pour instaurer une réelle neutralité dans l’organisation des élections. Cette commission, une fois mise sur pied, prendrait le relais du ministère de l’Intérieur qui, à l’aune de la loi actuelle, se charge d’appeler les collèges électoraux à se former. Autre avancée, le vote des émigrés, la facilitation de l’accès aux bureaux de vote pour les handicapés et les malades chroniques, la réglementation du financement des campagnes, de leur délai, de l’affichage y afférent, etc. Ainsi, l’article 71 du projet stipule que la campagne débute 60 jours seulement avant la date fixée pour les élections, lesquelles d’ailleurs, selon ce projet, doivent se tenir le même jour et ne plus être étalées sur deux ou trois jours. L’article 90 réglemente l’affichage sauvage des portraits des candidats, qui, aux dires de M. Abou Zeid, « envahissent nos rues et nos quartiers à tel point qu’il devient difficile de distinguer le chanteur du candidat aux législatives… ».
Concernant la mission des journalistes, la loi impose une « neutralité » qu’il convient de préserver lors de la couverture de l’opération électorale, comme le souligne l’article 86 du projet : « Pas d’insultes, pas de diffamation » à l’encontre d’un candidat précis au profit d’un autre.
L’article 87 dispose que les médias ont l’obligation de diffuser « la culture électorale », en précisant aux citoyens quelles sont les différentes étapes qui entourent le processus électoral, depuis l’obtention de la carte électorale jusqu’au vote proprement dit.
Autre mission des médias, tout aussi fondamentale, « soulever et souligner les irrégularités » qui peuvent avoir lieu lors des élections, insiste Vicky Hokayem. Ainsi, même si « certains responsables pensent que ce n’est pas grave de voter en dehors de l’isoloir, les journalistes doivent savoir que ceci est contraire à la loi en vigueur ». En effet, tant la loi actuelle que le projet Boutros exigent le respect du secret du vote, y compris la fermeture du rideau de l’isoloir… « Dans les grandes villes, les grandes agglomérations, le secret du vote n’a pas trop d’importance, car les gens ne se connaissent pas vraiment. Mais plus la circonscription est petite, plus les pressions sur les électeurs se font grandes, et plus il devient primordial de garantir le secret du vote », martèle Mme Hokayem. Les médias doivent également « faire comprendre aux citoyens pourquoi il est utile de voter » en plus de se poser en observateur. Pour cela, il est « impératif que le journaliste connaisse les dispositions de la loi pour savoir comment il doit couvrir l’opération électorale », ajoute Mme Hokayem. Observer l’opération électorale avant, pendant et après le vote proprement dit est donc l’un des rôles des médias dont la mission consiste à renforcer le poids de la société civile dans la gestion de cet acte démocratique. Il appartient également aux journalistes de respecter le secret du vote « en évitant de poser des questions aux citoyens, en direct, concernant la nature de leur vote ».
Toutefois, à l’heure actuelle, « tout le débat qui est axé autour de la loi électorale à adopter est en fait un faux débat », regrette M. Abou Zeid. « En fait, personne ne veut vraiment du projet Boutros, ni même d’une autre loi, même ceux qui réclament des élections anticipées », note-t-il.
L'Orient le jour- 3/4/2008