Les autorités préfectorales ont suspendu deux églises protestantes de Tizi Ouzou (Kabylie, Est) jusqu’à ce qu’elles reçoivent un « certificat de conformité » pour l’exercice de leur culte, a annoncé hier à l’AFP le pasteur Mustapha Krim, président de l’Église protestante d’Algérie. Il s’agit de l’église de la Nouvelle Ville et de Tafath (Lumière), qui comptent respectivement 700 et 200 membres, a précisé le pasteur.
Cette décision a été prise dans le cadre de la nouvelle loi de février 2006 régissant le culte des non-musulmans, considérée comme restrictive par ces derniers. L’exercice du culte non musulman, reconnu par la Constitution, est soumis à une autorisation préfectorale et doit être accompli dans des lieux autorisés par le ministère des Affaires religieuses. Les autorités préfectorales ont par ailleurs convoqué les responsables de l’église protestante de Larbâa Nath Irathen, dans le même département, « sans doute pour leur notifier la même demande », a indiqué le pasteur. Le pasteur Mustapha Krim a indiqué qu’il n’avait « pas l’intention de fermer les églises concernées » et qu’il allait « demander audience à la préfecture de Tizi Ouzou pour présenter le dossier complet autorisant ces églises à exercer leur activité en toute légalité ».
Une vive polémique oppose depuis plusieurs semaines responsables religieux musulmans et dignitaires chrétiens, accusés de prosélytisme. Les critiques s’adressent essentiellement à l’Église évangéliste, récemment implantée dans le pays, et qui compterait quelque 50 000 adeptes dont 10 000 pratiquants, regroupés dans 33 communautés, selon Mustapha Krim. Les autorités avaient auparavant refusé de renouveler le titre de séjour du pasteur américain Hugh Johnson, 74 ans, ex-président de l’Église protestante d’Algérie, à la retraite depuis 2006. Alger lui a demandé de quitter le territoire avant le 11 mars. Le recours du pasteur est en cours d’examen devant le Conseil d’État. Le ministre des Affaires religieuses, Bouabdallah Ghlamallah, avait récemment qualifié les évangélistes de « hors-la-loi », affirmant que leur objectif était de constituer « une minorité pour favoriser l’ingérence étrangère dans les affaires intérieures ». Selon ce ministère, l’Algérie compte seulement 11 000 chrétiens, toutes obédiences confondues, en majorité catholiques, sur 33 millions d’habitants.
La polémique est allée crescendo après la radiation de deux instituteurs algériens de confession chrétienne et la condamnation fin janvier à un an de prison avec sursis d’un prêtre catholique français d’Oran, Pierre Wallez, pour avoir animé un culte auprès de migrants clandestins camerounais, une action assimilée à du prosélytisme.
L'Orient le jour- 17/3/2008