Brusquer les choses serait « contre-productif », a-t-il estimé sur les ondes de Radio Vatican, de retour d'un voyage de 4 jours dans le pays (cf. Zenit du 30 novembre).
Alors que la Haute Cour de Lahore a annoncé que le cas d'Asia Bibi continuerait d'être examiné dans le cadre d'une procédure judiciaire normale, sans passer par une grâce présidentielle, le cardinal Tauran a souhaité une « approche sereine et graduelle parce qu'on ne peut pas penser tout résoudre à la fois ».
« Pour ceux qui vivent sur le terrain, c'est une maigre consolation », a-t-il reconnu. « Je crois qu'il faut éviter les choses trop brusques parce que finalement c'est contre-productif ».
« Beaucoup disent » qu'une libération trop rapide pourrait mettre la vie de ses proches en danger. « Je ne suis pas en mesure de l'affirmer mais je crois qu'effectivement dans ce cas-là il faut procéder avec beaucoup de prudence et avoir la conviction que la solution ne peut être que graduelle ». « On ne peut pas résoudre des problèmes aussi compliqués tout de suite », a-t-il affirmé.
Au cours de son voyage au Pakistan, le président du Conseil pontifical pour le dialogue interreligieux a rencontré le président pakistanais Ali Zardari et le ministre chargé des minorités religieuses.
« Le président de la République a manifesté une grande attention à la position du Saint-Siège en ce qui concerne la liberté de religion », a-t-il expliqué. « Il a formé une commission, qui est présidée par le ministre pour les minorités (qui est un chrétien), qui a pour but de revisiter un peu la loi sur le blasphème et d'envisager même peut-être une abrogation ».
Malgré tout, le président est « conscient qu'en autorisant la revisitation de la loi, il s'expose à une grande critique mais je crois qu'il est sincèrement acquis à l'idée qu'il faut que cette loi soit vraiment revisitée ». « Ce qui est important c'est que le gouvernement accepte de parler de ces choses-là de manière libre ».
Sur Radio Vatican, le cardinal Tauran a aussi évoqué la situation des chrétiens dans le pays. Ils « ont le sentiment d'être des citoyens de seconde zone ». « Nos frères vivent dans des conditions de tension et sont aussi très courageux ».
« Ce qui est encourageant – a-t-il ajouté – c'est que tout le monde est d'accord pour dire que le dialogue est la seule issue », même si « beaucoup notent une certaine raideur de la part des musulmans qui il y a quelques années étaient peut-être plus ‘dialoguant' ». « Il n'a jamais été question de remettre en question le dialogue avec les musulmans. Mais il y a toujours cette distinction entre les élites et la base », a-t-il estimé. « Si on arrive à bien dialoguer avec les élites, avec la base c'est beaucoup plus difficile ».
Marine Soreau
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