Située dans le nord du pays, la vallée de la Qadisha, ou "vallée sainte", accueille des communautés monastiques depuis les débuts de l'Église catholique maronite. Son paysage accidenté est truffé de monastères, d'ermitages et de grottes ayant abrité dès le Ve siècle des chrétiens fuyant les persécutions.
"Notre histoire est celle d'un martyre", assure le père Charbel Trad, un moine qui a consacré sa vie à préserver la foi maronite au Liban. "Notre vocation, en tant que maronites, est de rester ici, et de propager le christianisme à l'Est. Et nous n'avons pas peur".
Et si les attentats contre des églises à Bagdad (46 morts parmi les fidèles le 31 octobre) et Alexandrie (21 morts le 31 décembre) ont fait frémir les chrétiens libanais, peu d'entre eux estiment que de tels actes sont possibles au Liban, seul pays de la région où le président est chrétien.
"Prendre les chrétiens pour cible au Liban est plus difficile compte tenu de notre structure politique" où le pouvoir est segmenté entre les différentes confessions religieuses, explique Samir Geagea, chef des Forces libanaises.
Autrefois incontournable au Liban, la communauté chrétienne a cependant vu son poids politique s'éroder depuis le début de la guerre civile (1975-1990), du fait des nombreux départs et d'une faible natalité par rapport aux autres communautés du pays (chiites, sunnites et druzes).
"Tous les chrétiens du Proche-Orient sont dans une situation difficile. Leur pourcentage, leur importance (…) sont en baisse dans tous les pays qui vont de la Mésopotamie à l'Égypte, en passant par le Liban. Mais il y a des degrés différents", explique l'historien français des religions Odon Vallet. "Au Liban, les chrétiens sont déjà partis en masse. Ils sont beaucoup plus nombreux en Amérique et en Europe qu'au Liban", ajoute-t-il, reconnaissant qu'il y a "un risque" que le sort des chrétiens de la région se détériore.
Mais les raisons de partir ne sont pas toujours les mêmes.
Le Liban est ainsi devenu un refuge pour les chrétiens irakiens craignant pour leur vie, et dans le même temps, il est vu comme une entrave par ses propres chrétiens à la recherche de meilleures perspectives économiques et d'une plus grande stabilité politique.
"La solution pour notre communauté, c'est un visa pour ailleurs", regrette Teddy Awad.
Laba Ghosn, un boucher du village, approuve: "Il n'y a pas d'avenir ici pour les chrétiens. Regardez nos jeunes. Ils cherchent tous un moyen de s'en aller au plus vite".