A l’approche de l’ouverture d’un dialogue national convoqué par le roi Hamad Ben Issa Al-Khalifa, le 1er juillet 2011, pour relancer les réformes politiques après la répression de la contestation en mars, Reporters sans frontières dénonce le double discours des autorités à l’encontre des journalistes et de la liberté de la presse dans le pays. En effet, les médias et les professionnels de l’information continuent à être poursuivis et jugés devant des tribunaux militaires, et ce malgré la levée de l’état d’urgence le 1er juin dernier. Les autorités contrôlent toujours de manière stricte l’information qui circule sur le pays, tout en mettant en place une propagande médiatique à destination des Bahreïnis et de l’étranger. Reporters sans frontières exhorte la communauté internationale à réagir, en envoyant notamment un rapporteur spécial des Nations unis au Bahreïn.
Le photographe Mohamed Salman Al-Sheikh, président de la Bahrain Society of Photography (Société de photographie du Bahreïn) arrêté le 11 mai 2011, a été présenté devant la cour militaire de Riffa (deuxième ville du pays, au sud de la capitale) le 28 juin dernier. Sa famille, non informée de la tenue de son procès, n’a pas pu organiser sa défense. Aucune information n’a été donnée au sujet des charges pesant actuellement à l’encontre de ce journaliste freelance, qui a gagné de nombreux prix internationaux. Le procès a été reporté au 12 juillet prochain.
“dissémination de fausses informations sur des forums en ligne” et “incitation à la haine contre le gouvernement”. Le juge a refusé d’accéder à sa demande de libération sous caution. Par ailleurs, les services de sécurité présents au tribunal ont refusé à son épouse et à son avocat de s’entretenir avec lui, en dépit de l’autorisation accordée par le juge. Le procès a été reporté au 7 juillet prochain devant la cour martiale.
En outre, deux journalistes, Abdullah Alawi et Jassem Al-Sabbagh, arrêtés après avoir dû démissionner du journal Al-Bilad, sont poursuivis pour avoir publié des informations et images considérées comme fausses et pour avoir participé à des rassemblements illégaux. La deuxième session de leur procès s’est tenu le 23 juin 2011.
Le 22 juin dernier déjà, de très lourdes peines de prison avaient été prononcées par une cour militaire, à l’encontre de vingt-et-un suspects poursuivis pour “appartenance à des organisations terroristes” et “tentatives de renversement du régime”. Huit d’entre eux, parmi lesquels le militant des droits de l’homme et blogueur Abduljalil Al-Singace, ont été condamnés à perpétuité. Les treize autres ont reçu des peines allant de deux à quinze ans de prison. Le blogueur Ali Abdulemam, jugé par contumace, a lui aussi écopé d’une peine de quinze ans de prison. (http://fr.rsf.org/bahrein-un-blogue…)
Par ailleurs, les autorités du pays gardent un contrôle strict sur l’information concernant les procès en cours, en maintenant l’interdiction sur la publication de cas relevant de la sécurité nationale. L’agence de presse officielle, la BNA, publie quotidiennement un résumé de certains procès en cours, mais les procès concernant des journalistes autres que ceux d’Al-Wasat sont régulièrement ignorés.
En outre, les autorités avaient annoncé, le 14 juin dernier, leur intention de poursuivre le correspondant du journal Independent, Robert Fisk, l’accusant d’”orchestrer une campagne médiatique diffamatoire et préméditée”, et de faire “défaut à l’impartialité et la crédibilité professionnelle dans sa couverture unilatérale des événements”. Dans de nombreux articles, le journaliste avait dénoncé les procès contre les médecins et les infirmiers, accusés de soutien au mouvement de contestation. Il avait estimé que le pays avait été envahi par les forces saoudiennes, sans invitation préalable de la part des autorités.
Reporters sans frontières salue la libération du journaliste sportif Faysal Hayyat, arrêté le 8 avril dernier. Cependant, la justice du pays maintient les charges contre lui, à savoir des “crimes de sport” (sic). Le procès se déroulera selon les procédures légales du pays, selon un communiqué du procureur militaire. La date de son procès n’a pas encore été rendu publique.
Le blogueur Ali Omid a également été libéré.
A ce jour, sept autres net-citoyens et huit journalistes, dont trois photographes, sont toujours derrière les barreaux.
RSF