C’est d’Irak qu’est venue, en janvier 2009, la demande d’un Synode sur l’Église au Proche-Orient, par la voix de Mgr Louis Sako, archevêque chaldéen de Kirkouk, alors en visite ad limina à Rome. C’est à Rome que se tiendra cette assemblée spéciale du Synode des évêques, voulue par Benoît XVI, du 10 au 24 octobre 2010. Ses Lineamenta (documents préparatoires) ont été présentés le 19 janvier dernier.
Mais c’est à Chypre, le dimanche 6 juin, que Benoît XVI présentera l’Instrumentum laboris, le document de travail élaboré à partir des réponses apportées, jusqu’à ces derniers jours, par les onze Églises catholiques d’Orient aux questions posées par les Lineamenta.
Ce triangle géographique porte en lui-même une signification. Chypre, où Benoît XVI se rendra en visite officielle du 4 au 6 juin, fut au XVIe siècle un avant-poste de la chrétienté face à l’Empire ottoman. L’île, où aujourd’hui Grecs orthodoxes et Turcs musulmans sont séparés par un mur, est membre de l’Union européenne, mais de facto seulement pour sa partie sud et grecque.
Présentation de l'Instrumentum laboris en juin à Chypre
Les chrétiens chypriotes, catholiques, de rite latin et grec, maronites, orthodoxes figurent une chrétienté en miniature, déchirés tout autant qu’unis par deux mille ans d’histoire. Benoît XVI les rencontrera tous lors de sa visite.
Les thèmes du synode (montée des fondamentalismes et exil des chrétiens, modalités du dialogue islamo-chrétien, statut des patriarches, statut réciproque des orientaux et des latins en Occident et en Orient), tout autant que les défis communs aux Églises orientales (fortes diasporas, nécessaire approfondissement de la foi, besoin de reconnaissance) sont tous présents à Chypre. Par exemple, dans sa partie turque, ces trente dernières années, 133 églises, chapelles et monastères ont été transformés en mosquées, installations militaires, hôtels ou hôpitaux.
Côté orthodoxe, le pape déjeunera le samedi 5 juin avec Chrysostomos II, archevêque orthodoxe de Chypre. À l’issue de sa réception chaleureuse par Benoît XVI au Vatican, du 12 au 16 juin 2007, ce dernier avait souligné la position très favorable du pape sur le rapprochement avec les Églises orthodoxes.
Chypre, une île « présynodale »
Et il s’était risqué à un pronostic : « Chypre pourrait être une solution » si Benoît XVI et Alexis II, patriarche de Moscou, décidaient de se rencontrer en un lieu neutre, qui ne soit ni Moscou ni Rome. « Nous sommes ouverts à toutes les propositions et nous espérons sincèrement que les contacts aboutiront. »
Dans ce contexte, la réunion, toujours à Chypre, du 16 au 23 octobre 2009, de la Commission mixte internationale pour le dialogue théologique entre l’Église catholique et l’Église orthodoxe a pu alimenter des rumeurs sur la proximité d’une telle rencontre au sommet.
Ainsi, l’espace de ces deux journées de visite papale, l’île déchirée pourrait bien devenir une île « présynodale ». Ensuite, c’est à Rome, en terrain plus ouvert, que se jouera ce synode, et une partie de l’avenir des catholiques orientaux.