Le 26 septembre 2008, dans une émission diffusée sur la chaine Nova Televizia, le rédacteur en chef adjoint de Frognews, Alexandre Ivanov a confirmé que son supérieur Onyan Stefanov avait reçu, quelques jours avant son agression, des appels pressants de l’Agence de la sécurité nationale (DANS).
Alexandre Ivanov a également affirmé qu’il recevait depuis peu des menaces téléphoniques anonymes. Un inconnu lui a récemment dit : "Nous n’allons pas te tuer, mais il peut t’arriver la même chose qu’à ton chef". Le journaliste Dimitar Zlatov, qui participait à l’émission par téléphone, a lui aussi déclaré être confronté aux mêmes menaces.
Le 23 septembre, Onyan Stefanov, rédacteur en chef de Frognews, avait échappé à Sofia à une tentative de meurtre par quatre inconnus qui l’ont battu à coup de barres de fer et de marteaux. Les agresseurs sont soupçonnés d’appartenir à une organisation mafieuse connue sous le nom des « Marteaux », dont la « spécialité » consiste à casser les bras et les jambes des personnes qu’elle rackette.
Les pressions exercées sur les membres de la rédaction de Frognews font suite à la fermeture du site Opasnite.net qui avait mis en ligne des informations « classées secrètes » sur des affaires de corruption. Yorgo Petsas, journaliste à Frognews, avait été arrêté le 5 septembre 2008, et interrogé pendant sept heures par l’Agence de la sécurité nationale qui soupçonne la rédaction de Frognews d’être à l’origine de la création du site Opasnite.net. Yorgo Petsas n’a pas souhaité participer à l’émission de Nova Televizia par peur des représailles. Outre les menaces téléphoniques, le journaliste est également attaqué en justice par la société de taxis S-Express qui lui réclame un million d’euros de dommages et intérêts. La société, citée dans des documents publiés sur Opasnite, espionnerait ses clients au profit d’un groupe mafieux.
Le 25 septembre, à l’appel de la rédaction de Frognews, une centaine de journalistes, de bloggeurs et de citoyens se sont rassemblés devant le ministère de l’Intérieur. Le rédacteur en chef adjoint de Frognews, Alexandre Ivanov, a lu une déclaration signée par plusieurs journalistes bulgares, affirmant que « l’agression à l’encontre d’Onyan Stefanov est due à son travail d’investigation sur les affaires de corruption et de crime organisé lié au pouvoir ». Un appel à la formation d’une organisation indépendante des journalistes bulgares a également été lancé.
Par ailleurs, en réaction à qu’elle estime être une atteinte directe au droit d’informer, l’organisation non gouvernementale bulgare L’Association de la libre pensée Anna Politkovskaia (http://politkovskaya-bg.blogspot.com), a décidé de réactiver le site Opasnite.net fermé depuis le 5 septembre 2008. L’organisation a retrouvé le contenu du site dans les caches de Google et sur plusieurs blogs bulgares qui l’avaient conservé, et l’a republié sur le site www.opasnite.eu.
Pour l’association, la DANS a utilisé des méthodes illégales pour fermer le site. Certains documents présents sur le site font état de cas de corruption et de crimes graves qu’il faut impérativement étudier. La DANS a également déclaré à plusieurs reprises que ces documents étaient "classés secrets", reconnaissant de fait qu’il s’agit d’informations et non de rumeurs. Enfin, l’association considère que les liens supposés entre la fermeture d’Opasnite.net et la tentative de meurtre du journaliste Onyan Stefanov doivent faire l’objet d’une enquête approfondie. La fermeture du site constituerait dans ce cadre une destruction de preuves inacceptable.
Dans une lettre adressée au ministre bulgare des Affaires étrangères Ivailo Kalfin, le 26 septembre 2008, le représentant de l’OSCE pour la liberté des médias Miklos Haraszti, s’est dit "préoccupé par l’agression brutale du journaliste d’investigation Ognian Stefanov et effrayé de constater la fréquence avec laquelle des actes violents similaires ont été perpétrés contre des journalistes en Bulgarie ces dernières années".
Le parlement bulgare a sévèrement condamné l’agression du journaliste. Le président Guéorgui Parvanov avait par ailleurs qualifié de "défi à la capacité de l’Etat de garantir la sécurité des citoyens".
RSF 29.09.2008