Reporters sans frontières dénonce l’escalade dans la répression de la presse privée camerounaise, après l’arrestation, le 3 mars 2008, de Jacques Blaise Mvié, directeur de publication de l’hebdomadaire La Nouvelle presse,
et plusieurs agressions de journalistes couvrant les manifestations de rue qui secouent le pays.
"Le bilan des manifestations de ces dernières semaines commence à s’alourdir sérieusement pour la presse camerounaise. Tout est bon pour assurer l’avenir politique du président Paul Biya et de son clan, y compris, désormais, les arrestations arbitraires de journalistes. Le Cameroun étant un Etat de droit, rien ne peut justifier l’arrestation et le maintien au secret de Jacques Blaise Mvié, dont nous attendons la libération immédiate", a déclaré l’organisation.
Jacques Blaise Mvié a été arrêté dans la matinée du 3 mars par des soldats de la Sécurité militaire (Semil) sur ordre du ministre délégué à la présidence de la République en charge de la Défense nationale, Rémy Ze Meka. La Nouvelle presse avait publié, le 27 février, un article dénonçant l’implication de ce dernier dans une prétendue "tentative de coup d’Etat", en septembre 2007, ayant entraîné plusieurs arrestations dans les rangs de l’armée. On ignore encore le lieu de détention de Jacques Blaise Mvié.
Par ailleurs, plusieurs agressions de journalistes couvrant les manifestations de rue à Douala ont été enregistrées. Eric Golf Kouatchou, cameraman de la chaîne privée Canal 2 International a été brutalisé et brièvement détenu, le 27 février, par des agents du Groupement mobile d’intervention (GMI), en compagnie de plusieurs manifestants. Sa caméra a été détruite et il n’a été libéré que contre le paiement, sans reçu, d’une caution de 56 000 francs CFA (environ 83 euros). De même, David Nouwou, rédacteur en chef délégué du quotidien privé La Nouvelle expression, Patient Ebwele, correspondant du quotidien privé Le Jour, et Yvonne Cathy Nken, journaliste de Canal 2 International, ont été victimes d’agresssions physiques de la part des forces de l’ordre.
Ces incidents interviennent dans un contexte de grande tension entre le gouvernement, l’armée et la presse. Fin février, les autorités ont ordonné la suspension de la chaîne de télévision privée Equinoxe TV et des stations privées Radio Equinoxe et Magic FM.
La grogne sociale actuelle a été provoquée par l’augmentation du prix de l’essence et des produits de première nécessité, et par le projet de révision de la Constitution visant à autoriser le chef de l’Etat, Paul Biya, au pouvoir depuis 1982, à briguer un nouveau mandat en 2012.
reporters sans frontieres- 4/3/2008