Avec le décès de Mgr Francis Lü Shouwang, tous les sièges épiscopaux du Hubei sont désormais vacants, annonce Eglises d'Asie, l'agence des Missions étrangères de Paris, en ce mois de mai où les chrétiens prient spécialement pour l'Eglise de Chine.
La messe de funérailles s'est déroulée à Yichang, en la cathédrale Saint-Francis, en présence de plusieurs centaines de fidèles ainsi que de représentants des autorités civiles. Mgr Lu n'avait dû qu'à sa maladie le fait de pouvoir éviter d'assister, en décembre dernier, à la 8ème Assemblée nationale des représentants catholiques. Convoquée par les autorités, celle-ci avait été marquée par l'élection d'évêques illégitimes à la tête de la Conférence des évêques « officiels » (2).
Né en 1966, formé au grand séminaire régional de Wuhan, Mgr Lü Shouwang avait été ordonné prêtre en 1991. Il présentait la particularité d'appartenir à la minorité ethnique des Tujia, originaire des monts Wuling, dans l'ouest des provinces du Hunan et du Hubei, et l'une des 55 minorités reconnues par les autorités. Curé de paroisse dans un premier temps, enseignant ensuite au grand séminaire de Wuhan, il avait été appelé en 1999 à la curie diocésaine par son prédécesseur, Mgr Paul Francis Zhang Mingqian. En 2007, deux ans après le décès de ce dernier, il était ordonné évêque de Yichang, sa nomination étant effectuée par Rome et acceptée par les autorités chinoises (3).
Mgr Lü Shouwang laisse le souvenir d'un homme modeste et plein d'humour, désireux d'améliorer l'administration de son diocèse. Pour les quelque 30 000 catholiques de Yichang, ainsi que pour ses 24 prêtres et 12 religieuses, le décès de l'évêque laisse un grand vide. Mgr Lu est le premier évêque « officiel » à mourir aussi jeune.
Sa mort replace le Hubei sur le devant de la scène catholique à un double titre. Premièrement, l'Eglise au Hubei, si elle compte cinq diocèses « officiels », en compte, dans les registres du Saint-Siège, onze (neuf diocèses et deux préfectures apostoliques). C'est en 1999 que les autorités civiles ont entrepris de redécouper la carte des circonscriptions ecclésiales afin de les faire correspondre aux circonscriptions administratives. En avril dernier, en dépit du contexte tendu créé par l'ordination épiscopale illégitime de Chendge et la tenue de la 8ème Assemblée nationale des représentants catholiques (4), le communiqué publié au Vatican à l'issue de la quatrième réunion de la Commission pour l'Eglise en Chine réitérait que le Saint-Siège était « ouvert à » pour une discussion avec les évêques et les autorités chinoises afin de redéfinir les frontières des circonscriptions ecclésiastiques. Le Hubei présente donc une illustration de la nécessité pour Rome, Pékin et les évêques de Chine de s'entendre sur les contours des diocèses.
Deuxièmement, les cinq diocèses « officiels » du Hubei sont aujourd'hui sans évêque. Dans le communiqué du 14 avril, la Commissions vaticane pour l'Eglise en Chine soulignait « l'urgence » à pourvoir les diocèses sans pasteurs, l'Eglise étant « préoccupée » par cette question. En 2007, dans sa Lettre aux catholiques de Chine, le pape Benoît XVI écrivait : « Le Saint-Siège aimerait être entièrement libre de la nomination des évêques ; considérant donc le récent chemin particulier accompli par l'Eglise en Chine, je souhaite que l'on trouve un accord avec le gouvernement pour résoudre certaines questions concernant soit le choix des candidats à l'épiscopat, soit la publication de la nomination des évêques, soit la reconnaissance – avec les effets civils dans la mesure où ils sont nécessaires – du nouvel évêque de la part des autorités civiles. » Le communiqué du 14 avril 2011 lançait un appel « pour que les problèmes ne grandissent pas et les divisions ne s'approfondissent pas, au détriment de l'harmonie et de la paix ». On se souvient qu'avant que n'intervienne l'ordination illégitime de l'évêque de Chendge, dix évêques en 2010 avaient été ordonnés avec l'accord de Rome et de Pékin. Les informations disponibles font état de nombreuses ordinations en préparation dans les mois à venir, afin, justement, de réduire le nombre des sièges épiscopaux vacants. Plus d'une dizaine de candidats à l'épiscopat ont été pressentis au sein des structures « officielles » et, dans l'Eglise, l'inquiétude grandit du fait qu'au moins trois ou quatre de ces candidats ne recevraient pas l'assentiment du pape, dont le candidat pour le siège de Wuhan. Nul doute qu'au cas où Pékin presse ces candidatures, les difficultés mises à jour par l'ordination de Chendge ne feraient que s'aggraver.
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