Reporters sans frontières dénonce l’interdiction pendant trois mois de l’hebdomadaire économique China Business Post, accusé d’avoir violé la loi dans un article sur la Banque agricole de Chine. Par ailleurs, le Département de la propagande continue de maintenir un contrôle sur les informations liées au scandale du lait toxique. Et un journaliste d’investigation a été censuré dès juillet sur ce sujet pour ne pas gêner la tenue des Jeux olympiques de Pékin.
"Alors que l’inquiétude grandit sur la crise bancaire internationale et le scandale du lait toxique, il est déplorable que des responsables locaux et nationaux tentent de censurer des médias qui ne font que remplir leur rôle d’information envers le public. Nous demandons la levée de l’interdiction temporaire du China Business Post et la fin de la censure sur le scandale du lait. Si de telles mesures ne sont pas prises, c’est la crédibilité des promesses gouvernementales de transparence qui sera de nouveau entachée", a affirmé l’organisation de défense de la liberté de la presse.
Le 8 septembre 2008, l’hebdomadaire économique China Business Post, diffusé à quatre cent mille exemplaires, a été suspendu pour une durée de trois mois, suite à une décision du Bureau de la presse et des publications de Mongolie intérieure (Nord) où est enregistrée sa licence. Suite à des négociations, le journal a pu publier son édition du 11 septembre, mais celle du 18 septembre a été interdite. Cette sanction fait suite à des plaintes de hauts responsables de la province du Hunan (Sud) et de la Banque agricole de Chine. Le journal avait mis en cause, en juillet, le bureau de Changde (province du Hunan) de cette banque publique pour sa mauvaise gestion d’actifs.
Selon les autorités, la rédaction, basée à Pékin, a violé une réglementation qui interdit à un média de publier une enquête sur un événement ayant eu lieu dans une province autre que celle où est enregistrée sa licence. Les autorités ont également estimé que le China Business Post aurait dû interroger la Banque agricole de Chine avant de publier l’article. Pour justifier sa décision, les responsables de Mongolie intérieure ont cité d’autres enquêtes du journal économique qui violeraient ces réglementations.
Dans une déclaration au Financial Times, le magnat de la presse Bruno Wu, propriétaire du China Business Post à travers le groupe Sun Media, a dénoncé un "abus du pouvoir administratif". Le 24 septembre, il a annoncé aux employés du journal qu’il avait décidé de suspendre indéfiniment la publication de l’hebdomadaire pour protester contre cette décision. Une source au sein du journal a affirmé à Reporters sans frontières qu’un recours avait été déposé auprès des autorités compétentes.
Au même moment, le Département de la propagande a renforcé son contrôle sur les informations disponibles dans les médias et sur Internet à propos du scandale du lait maternisé frelaté qui a provoqué l’intoxication de milliers d’enfants chinois.
Selon plusieurs journalistes chinois, il apparaît de plus en plus évident que les autorités ont empêché, en juillet, la publication d’une enquête sur ce lait toxique pour ne pas affecter l’image de la Chine avant les Jeux olympiques. Ainsi, He Feng, journaliste de l’hebdomadaire Nanfang Zhoumo, a été censuré en juillet alors qu’il avait recueilli des informations préoccupantes sur l’impact sanitaire du lait produit par l’entreprise Sanlu. De nouveau, le 13 septembre, un article de He Feng sur les responsabilités des entreprises laitières a été supprimé par la direction de l’hebdomadaire.
Le 12 septembre, une circulaire du Département de la propagande avertissait qu’il était dans l’intérêt des médias et des sites Internet de limiter la publication d’articles ou de commentaires sur le scandale des produits laitiers.
Enfin, l’organisation Chinese Human Rights Defenders a révélé que Qi Yanchen, économiste qui a déjà été emprisonné de 1999 à 2003, a été convoqué par la police après qu’il avait critiqué, sur les ondes de Radio Free Asia, la gestion de ce scandale par les autorités.
RSF 29.09.2008