« Perspectives des leaders religieux pour une sortie de crise et une cohésion sociale durable en Côte d'Ivoire » : tel était le thème du forum d'échanges qui a eu lieu le 23 mars dernier, à Cocody, à l'est d'Abidjan,
entre la Banque mondiale et les leaders religieux conduits par l'archevêque d'Abidjan, Mgr Jean-Pierre Kutwa et le président du Conseil supérieur des Imams de Côte d'Ivoire, Cheick Aboubacar Fofana, qui ont tous deux plaidé pour l'avènement d'un « ordre nouveau » en Côte d'Ivoire.
« L'heure est venue de nous débarrasser du mensonge, de quitter l'arène des coups bas, de la duplicité et de l'hypocrisie pour adopter désormais le langage de la vérité libératrice et constructrice », a déclaré l'archevêque d'Abidjan après avoir dressé un tableau particulièrement sombre de la société ivoirienne qui selon lui, « a perdu tous ses repères ».
D'après un compte-rendu du forum d'échanges par la presse ivoirienne, en particulier des quotidiens Fraternité matin et nord-sud, le prélat de l'Eglise catholique ivoirienne a passé en revue les maux qui affligent le pays, (exploitation politicienne de la régionalisation, injustices, dépravation des mœurs, chômage, pauvreté accrue.) avant d'indiquer qu'il est temps pour le pays de tourner une nouvelle page de son histoire.
A la lumière des prochaines élections présidentielles, attendues depuis la fin du mandat de Laurent Gbagbo, en octobre 2005, mais sans cesse repoussées, en raison de la crise politico-militaire qui afflige le pays depuis septembre 2002, Mgr Kutwa estime que les ivoiriens, que ce soit avant ou après les élections, doivent de toute façon travailler à « une vraie réconciliation ».
« Dans un premier temps, nous avons à rechercher la paix avec tous nos frères, quelles que soient leurs origines ou leurs croyances (…) puis dans un deuxième temps à établir un projet de société consensuel », a-t-il recommandé, souligne le quotidien nord-sud dans son article.
Mgr Kutwa s'est dit « d'accord pour aller aux élections », mais, a-t-il précisé, « il ne faut pas y aller pour y aller », rapporte pour sa part Fraternité matin.
Evoquant des informations faisant état d'irrégularités ou de fraudes dans l'enrôlement, l'archevêque estime qu'« il serait bon que la Commission électorale indépendante assume ses responsabilités en prenant des dispositions justes et audacieuses, pour garantir la démocratie et permettre au peuple ivoirien d'exercer sa souveraineté ».
« Tant que ces dispositions ne seront pas prises, dit-il, une élection précipitée entraînerait le pays dans le chaos ».
Selon lui, rapporte Fraternité matin, « la religion et la dimension spirituelle peuvent aider à la sortie de la crise en renonçant à toute ambition, implication politique dans le sens de l'accaparement de l'exercice ».
Un avis que partage le Cheick Aboubacar Fofana qui, durant son intervention au Forum d'échanges, a insisté sur les origines de la crise que traverse la Côte d'Ivoire, estimant que pour en sortir, rapporte le journal nord-sud, « il ne faut pas s'attendre seulement à ce que les fusils se taisent ou croire que les élections vont résoudre tous les problèmes du pays ».
Il faut selon lui, poursuit le quotidien ivoirien, « réconcilier les Ivoiriens entre eux à travers un nouveau contrat social comme projet de société pour penser à mettre une nation en place et qu'on accepte nos diversités culturelles, ethniques, religieuses, d'opinion et de pensée. C'est indispensable et nous n'avons pas le choix ».
L'Imam suggère qu' « une véritable alchimie se fasse dans les esprits afin de signer un nouveau contrat social entre les fils et filles de la Côte d'Ivoire ».
En résumé, pour les deux responsables religieux « l'instauration de la paix n'est pas seulement synonyme de cessation du conflit armé, mais plutôt l'élimination de ses causes ».
Et pour Aboubacar Fofana, cela « doit passer par la promotion d'une saine spiritualité », l'imam estimant à ce propos qu'« il y a des lieux de culte qui devraient êtres fermés en Côte d'Ivoire, puisque dans ces espaces, il y a des gens qui mettent à l'index d'autres Ivoiriens comme des diables », rapporte le quotidien nord-sud.
ROME, Mardi 31 mars 2009 (ZENIT.org)