Mettant sur les rails le synode sur le Moyen-Orient, hier au dernier jour de sa visite à Chypre, le pape Benoît XVI a lancé un appel pour la paix, estimant qu’une disparition des chrétiens d’Orient « constituerait une perte pour ce pluralisme qui a caractérisé depuis toujours » les pays de la région.
Le pape a également affiché sa sollicitude pour les maronites du Chypre, au nombre de quelques milliers de personnes, chassés de leurs villages depuis l’invasion turque en 1974. Là aussi, on a l’impression qu’à travers eux l’Église universelle veut sauver un modèle menacé de disparition.
Au dernier jour de son voyage à Chypre, le pape Benoît XVI a lancé un appel hier pour la paix au Proche-Orient, réclamant un effort international « urgent » pour éviter « de plus grandes tragédies ». Il a également mis sur les rails le synode sur le Moyen-Orient, programmé en octobre, qui tentera de remédier à la délicate situation des chrétiens dans cette région conflictuelle.
« Je réitère mon appel personnel en faveur d'un effort international, urgent et concerté, pour résoudre les tensions actuelles au Moyen-Orient, spécialement en Terre sainte, avant que de tels conflits ne conduisent à de plus grandes tragédies », a dit Benoît XVI lors d'une grand-messe dans un centre sportif de Nicosie. Le document synodal publié hier dresse un panorama de la situation dans la région et appelle notamment chrétiens, juifs et musulmans à affronter ensemble la « menace » que constituent les courants extrémistes musulmans et des groupes fondamentalistes chrétiens, dans une référence implicite à certains mouvements évangéliques.
Évoquant les chrétiens tentés par l'émigration, il affirme que leur « disparition constituerait une perte pour ce pluralisme qui a caractérisé depuis toujours les pays du Moyen-Orient ». Avant de remettre le document aux membres du conseil présynodal, le pape a également dit « prier » pour que les travaux de cette assemblée aident « à centrer l'attention de la communauté internationale sur la situation des chrétiens du Moyen-Orient qui souffrent pour leur foi ». Soulignant « les grandes épreuves » endurées par ces chrétiens, notamment dans les territoires palestiniens, en Irak et en Égypte, et leur « rôle inestimable », Benoît XVI a espéré que leurs « droits soient de plus en plus respectés, y compris le droit à la liberté de culte et religieuse », et qu'ils ne « souffrent plus jamais de discrimination d'aucune sorte ».
Près de 7 500 personnes étaient rassemblées dans le gymnase à Nicosie, et 4 000 suivaient la célébration sur deux grands écrans à l'extérieur, selon les organisateurs. Parmi elles, des délégations venues de Syrie, du Liban ou de Jordanie. De nombreux fidèles des communautés philippine, sri-lankaise et indienne, pays d'origine d'une grande partie de la main-d'œuvre immigrée de l'île, parfois en vêtements traditionnels, avaient aussi fait le déplacement. Aux portes de centre sportif, une vingtaine de personnes ont protesté sans incident contre la venue du souverain pontife, affirmant qu'il était « persona non grata ». « Le pape est schismatique et hérétique » ou « Le pape est indésirable sur notre terre orthodoxe », pouvait-on lire sur leurs banderoles.
Le pape a quitté l'île en fin d'après-midi, après avoir appelé à un règlement de la question de Chypre, divisée depuis 1974 entre la République turque de Chypre-Nord (RTCN, uniquement reconnue par Ankara), majoritairement musulmane, et la République de Chypre, au Sud, majoritairement orthodoxe. « Il est sûr que la vérité et la réconciliation, liées au respect, sont les fondations les plus solides pour le futur unifié et pacifié de cette île », a-t-il dit.
Une rencontre prévue hier entre le pape et le leader des musulmans de Chypre-Nord a été annulée, le mufti Yusuf Suicmez étant arrivé trop tard pour la rencontre, selon le Vatican. La veille, Benoît XVI avait brièvement rencontré à Nicosie une personnalité musulmane chypriote turque, le cheikh Nazim Haqqani, une rencontre non prévue au programme de sa visite. Le chef spirituel soufi, âgé de 88 ans, originaire de Larnaca, a attendu le pape sur son parcours pour l'église franciscaine de la Sainte-Croix. Le pape a arrêté la procession pour le saluer brièvement. Cheikh Nazim a indiqué qu'il avait entendu parler de la visite du pape et qu'il voulait le rencontrer. Le cheikh a offert au pape un bâton gravé, une tablette avec des paroles de paix en arabe et un rosaire musulman, et lui a demandé de lui donner l'accolade, ce à quoi le pape a accédé.
L'orient le jour