Mgr Antoine Hérouard, Secrétaire général de la Conférence des évêques de France, revient pour Zenit sur la 40e rencontre des secrétaires généraux des conférences épiscopales, qui s’est tenue en Ecosse, à Edimbourg du 29 juin au 2 juillet 2012 (cf. Zenit du 3 juillet 2012).
Zenit – Quel était le but de cette rencontre ?
Mgr Antoine Hérouard – C’est d'abord un lieu de réflexion commune et de partage. Les expériences, les situations, sont différentes d’un pays à l’autre et il est toujours intéressant et enrichissant de pouvoir échanger et connaître ce qu’il se passe ailleurs. Il est important de pouvoir aussi expliquer comment les choses se passent dans son propre pays. C’est l’occasion pour moi de témoigner de la vitalité de l’Eglise en France, qui même si elle vit des difficultés, a un dynamisme réel, y compris dans l’expression de la foi des chrétiens dans la société.
Quel message retenez-vous de cette rencontre ?
Le thème général de la rencontre était la manière dont les chrétiens pourraient se situer dans la société chrétienne aujourd’hui, dans la perspective de la nouvelle évangélisation. J’en retiens qu’il est nécessaire que l’Eglise et les chrétiens, aussi bien au niveau des responsables que des fidèles, soient présents dans la société et expriment ce qu’ils pensent, dans une perspective de recherche du bien commun pour l’ensemble de la société. Il ne s’agit pas que les chrétiens soient une sorte de « super-lobby » actif qui voudrait imposer un certain nombre de choses à la société, mais qu’ils permettent à l’ensemble des citoyens de réfléchir aux enjeux fondamentaux, en particulier autour de la dignité humaine, du respect des plus petits, des valeurs de solidarité…
Le communiqué final en appelle à « l’excellence intellectuelle » des chrétiens. Qu’est-ce que cela signifie ?
Nous vivons en Europe dans une société marquée par une perte de foi et par la sécularisation. Face à cela, plusieurs pistes ont été avancées, notamment sur la relation au monde politique, sur l’expression publique dans les différents pays européens, mais aussi sur la relation au monde de la culture. Nous avons soulevé la nécessité d’avoir une expression de la foi qui soit enracinée et qui puisse être en dialogue avec les penseurs d’aujourd’hui. Il faut souligner à ce sujet la difficulté pour un certain nombre de chrétiens à être capables de rendre compte de façon crédible et simple de leur propre cheminement de foi. Voilà ce que nous entendions par « excellence intellectuelle ».
C’est donc un appel à approfondir sa foi ?
Oui. Il s’agit aussi de la capacité de dire quelque chose de sa foi, de l’exprimer, d’en montrer sa cohérence, et de montrer que ce ne sont pas des éléments auxquels on croit de manière vague. C’est la construction d’une « colonne vertébrale chrétienne », pourrait-on dire.
Quels sont les outils pour construire cette "colonne vertébrale" ?
Je pense que cela passe beaucoup par la formation. C’est à la fois la démarche de la catéchèse et celle des formations complémentaires, qu’elles soient d’ordre biblique, théologique ou autre. Il s’agit de tout ce qui permet aux chrétiens de réfléchir sur leur foi. Les homélies dominicales aussi ont ce rôle. Aujourd’hui, nous sommes dans un monde où il est courant, dans le milieu professionnel par exemple, de se former tout au long de la vie. Dans ce contexte, il n’est pas très normal qu’au niveau de la foi on en reste à des expressions qui remontent à l’enfance. Il faut approfondir la foi.
Quelle est la situation en France à ce sujet ?
Beaucoup d’initiatives sont lancées dans ce domaine. Énormément de laïcs se forment, que ce soit dans les instituts catholiques ou dans le cadre de pastorales diocésaines. Certains se forment en vue d’une mission qui leur sera confiée par l’Eglise. D’autre le font de façon plus personnelle, pour leur propre intelligence de la foi. Il faut aider les chrétiens français à prendre conscience que la foi ne doit pas être complètement privatisée, ils n’en sont pas les propriétaires. Au contraire ils ont aussi à l’exprimer, à la partager, à savoir en rendre compte, et ce non pas de manière agressive, ni en se sentant accusés ou persécutés par les autres, mais dans un dialogue. Et les chrétiens doivent être crédibles dans ce dialogue.
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