Si je lève le doigt vers un avenir gonflé d’espoirs, les réalistes me traitent d’idéaliste : et si je le baisse sur le présent écrasé d’échecs, les utopistes me taxent de défaitiste.
Seigneur, donne-moi le courage de n’accepter que de Toi la rude vocation de prophète et d’être à tous coups perdant parmi les hommes !
Qu’il est difficile d’être pédagogue de la paix ! Au milieu de sourds qui croisent le fer des menaces, comment faire entendre la voix qui les éloigne tous de cette bordure du gouffre où à tout instant risque de s’engloutir l’humanité ?
Seigneur donne-moi l’adresse de bien expliquer que la paix n’est pas si simple que le cœur ne l’imagine, mais plus simple que la raison ne l’établit !
Qu’il est difficile de croire que la paix est entre mes mains ! Et pas seulement entre les mains des stratèges et des super-grands. Chaque jour, par ma façon de vivre avec les autres plus que par un défilé ou un manifeste, je choisis pour ou contre la paix.
Seigneur, donne-moi la lumière pour découvrir les vraies racines de la paix, celles qui plongent jusqu’au cœur de l’homme réconcilié avec Dieu !
Qu’il est difficile d’accueillir l’Évangile de la Paix ! De quelque côté que l’on se trouve, à l’Ouest comme à l’Est. Dans une jungle de fauves aux dents de fusées, comment faire comprendre que perdre son âme est encore plus dangereux que de laisser sa peau ?
Seigneur, donne-moi la force d’aider ceux qui puisent la sève des Béatitudes à briser la logique absurde et la spirale infernale de la violence !
Seigneur, tous ces crépitements autour de la paix me révèlent que le moindre accroc à la tunique de la paix fait crier l’homme. Toucher à la paix, c’est plus que toucher à un problème, c’est même plus que toucher à l’homme, c’est toucher à Dieu, à Celui que saint Paul nous présente comme étant lui-même la Paix (Ep 2, 14).
Seigneur, apprends-moi à gagner la Paix !
Amen.
Cardinal Roger Etchegaray
zenit