Le 26 février 2009, le procès en appel du rédacteur en chef de l’hebdomadaire Tasjargan, Bakyttoul Makimbaï et de son journaliste, Almas Koucherbaiev s’est déroulé devant la cour d’appel d’Almaty.
Les poursuites ont été engagées par un député, Ramin Madinov après la publication d’un article, le 24 avril 2008, “Le pauvre propriétaire terrien”. Le parlementaire avait réclamé en première instance des excuses et une compensation financière de 300 millions de tengue (1 600 000 euros). Le 16 janvier 2009, un tribunal d’arrondissement avait fixé à 3 millions de tengue (16 000 euros) l’amende à payer par le titre et les journalistes.
Lors du procès en appel, la défense a fait valoir que le paiement d’une telle somme était injuste et disproportionné dans la mesure où ni le journal ni les journalistes ne disposaient de moyens financiers suffisants. Cela n’a pas empêché la cour d’appel de fixer les montants des compensations à 30 millions de tengue, soit 160 000 euros (200 000 dollars pour la version anglaise).
Reporters sans frontières et la fondation « Journaliste en danger » considèrent que la décision de la cour d’appel d’augmenter le montant de l’amende, est motivée par une volonté explicite de ruiner un journal populaire (au tirage supérieur à 400 000 exemplaires), qui ouvre ses colonnes à l’opposition.
“Nous sommes d’autant plus affligés par la persistance de ce type de pratique que ce pays est amené à présider l’Organisation pour la Sécurité et la Coopération en Europe en 2010”, a poursuivi l’organisation de défense de la liberté de la presse.
“S’il est normal que des poursuites pour diffamation puissent être engagées contre des médias, les peines encourues doivent rester proportionnées et ne pas mener à la disparition pure et simple d’un titre. Dans le cas contraire, il s’agit de censure dissimulée”, a conclu Reporters sans frontières.
Tasjargan, qui a fêté ses dix ans en 2008, a lancé un appel à ses lecteurs afin de rassembler une partie des fonds nécessaires. Mais il est certain que cela sera insuffisant et que cette publication populaire sera contrainte à la fermeture par cette décision qui condamne, de plus, le journaliste Almas Koucherbaiev au chômage.
Pour mémoire, une amende d’un tel montant ne connaît qu’un seule précédent dans l’histoire de la presse kazakhe. En 1999, DAT, le premier journal du pays en langue kazakhe avait été contraint de cesser ses activités, tandis que son rédacteur en chef, Charip Kourakbaev, avait été empêché pendant de longues années de travailler dans le domaine médiatique.
RSF 02.03.2009