Une année « intense », c’est ainsi que le P. Federico Lombardi, directeur de la salle de presse du Saint-Siège, qualifie, dans un entretien accordé à Radio Vatican, l’année 2010 de Benoît XVI.
Une année marquée, entre autres, par cinq voyages internationaux, quatre visites pastorales en Italie, la publication d’une exhortation apostolique – « Verbum Domini » – et de son livre-entretien – « Lumière du Monde » -, la tenue du synode pour le Moyen Orient et d’un consistoire pour la création de nouveaux cardinaux, et 45 audiences générales.
Dans son récent discours à la curie romaine, le pape a aussi reconnu que l’année a été marquée par le scandale des abus sexuels commis par des membres du clergé.
A ce propos, le P. Lombardi fait observer : « Le problème de cette année n’est pas complètement nouveau. Dans des pays comme les Etats-Unis, il s’était posé avec une grande intensité il y a une dizaine d’années. En Irlande aussi, le problème remonte aux années passées, et, pendant l’année 2009, le pape l’avait déjà affronté, avec des évêques d’Irlande : le pape avait annoncé sa lettre aux catholiques d’Irlande sur ce thème. Mais il est vrai qu’au cours de cette année, le problème s’est posé avec force y compris dans les pays européens, et cela a suscité des réactions notables et de la confusion. Le souverain pontifie a posé de nombreux actes et a fait de nombreuses interventions, qui ont été exemplaires, sur la façon d’affronter ce problème, et dans quel esprit. Il a manifesté, par l’écoute des victimes à différentes occasions, combien il était prêt à écouter, comprendre, participer à la souffrance. Dans de nombreux cas, il a invité l’Eglise à un profond renouveau : rappelons le discours final de l’Année sacerdotale, qui nous a tous touchés très profondément. Il a ensuite encouragé concrètement tous ceux qui s’engagent dans le domaine de la prévention, et pour la guérison de ces blessures. Nous allons donc dans la bonne direction, pour surmonter le drame de ce scandale qui a blessé profondément tant de personnes, mais qui doit être pris comme l’occasion d’un renouveau, de la capacité d’écouter, d’une réflexion en profondeur sur tous ces thèmes. Donc, pas seulement sur le thème de la sainteté sacerdotale, mais aussi sur les thèmes de la sexualité et du respect de la personne dans le monde d’aujourd’hui, où, dans de nombreux cas, ce respect est justement absent pour ce qui concerne la dimension de la sexualité et de l’affectivité. De ce grand drame, j’espère que puisse sortir, pour l’Eglise, un élan de renouveau et aussi d’engagement aux frontières les plus approfondies pour servir la dignité de la personne humaine, la sainteté de la vie. »
Pour ce qui est des appel de Benoît XVI à la liberté religieuse, le P. Lombardi ajoute : « Habituellement, en pensant aux persécutions, aux difficultés des chrétiens, nous regardons principalement vers les pays du Moyen-Orient, mais il est vrai, hélas, qu’il y a des problèmes dans tant d’autres régions du monde: nous pensons aux faits survenus en Inde, aux Philippines, et dans tant d’autres régions de l’Asie. Ce qui nous a beaucoup attristés, en particulier ces derniers mois, ce sont les problèmes posés à la liberté de religion, de conscience des chrétiens en Chine. A ce propos, il y a eu certaines interventions importantes et aussi très explicites de la part des autorités vaticanes. Le document pour la Journée mondiale de la paix de cette année, a cependant invité aussi à élargir le regard à l’Occident, aux sociétés sécularisées. Le terme « christianophobie » a été utilisé pour la première fois par le pape dans son discours à la curie romaine, et c’est quelque chose qui concerne aussi nos pays et nos cultures : cette tentative de reléguer aux marges de la vie politique, en particulier, les signes chrétiens et les expressions de la vie chrétienne. Insister sur le droit à pratiquer explicitement et librement la foi chrétienne dans toutes les régions du monde, y compris dans celles des pays sécularisés, comme une contribution à la bonne vie de la société, a été l’un des messages les plus significatifs du Saint-Père durant le voyage au Royaume Uni, et il a été très écouté, en particulier dans le discours à Westminster Hall. »
A propos du synode des évêques pour le Moyen Orient, le P. Lombardi souligne que, même après sa conclusion, « il y a eu des signes de violence et de difficultés pour les chrétiens » – il cite l’attentat contre la cathédrale syro-catholique de Bagdad – et que « le synode a donné une impression de vitalité, d’engagement, de désir de témoigner activement, de la part des chrétiens des différents rites, des différentes communautés de la région » : « Ce fut aussi un signe d’espérance, en dépit des difficultés qui demeurent ».
Parmi les voyages du pape, Benoît XVI a qualifié celui au Royaume Uni « d’inoubliable », notamment avec la béatification de Newman. « La figure de Newman a été importante dans ce voyage, rappelle le P. Lombardi. Pour le pape, la figure de Newman a une signification cruciale pour le rapport entre foi, raison et spiritualité. Lors de son dernier discours à la curie romaine, le pape a mis en relief un autre aspect, qu’il n’avait pas approfondi au cours du voyage au Royaume Uni, c’est-à-dire celui de la conscience : qu’est-ce que signifie la conscience pour le cardinal Newman en tant que fil conducteur sur le chemin de la recherche de la vérité ? La personnalité de Newman, surtout pour le monde anglophone, mais aussi pour l’Eglise universelle, est proposée par le pape comme une figure lumineuse, en un temps où il faut trouver, même au milieu des difficultés, mais avec constance, un chemin dans le contexte d’un débat culturel, religieux, spirituel très exigeant. »
A propos de la création du nouveau dicastère pour la promotion de la Nouvelle Evangélisation, le P. Lombardi précise : « La constitution d’un nouveau dicastère a peut-être été une surprise, parce qu’on ne pensait pas qu’il fallait de nouvelles institutions à l’intérieur de la curie romaine. Mais le message est très clair : le message de la priorité de l’annonce, de l’annonce de l’Evangile, dans la mission de l’Eglise, toujours à travers les époques, même dans des situations difficiles. Le dicastère de la Nouvelle évangélisation est un message spécifique mais doit travailler dans le contexte de la mission plus large de l’Eglise, pour l’annonce explicite de l’Evangile dans le monde d’aujourd’hui. »
Pour le P. Lombardi le livre « Lumière du monde » constitue un « vrai acte de courage communicatif ». Il s’explique : « Nous continuons de découvrir les caractéristiques spécifiques du pape Benoît XVI en direction de la communication. On avait l’idée qu’il était un pape non-communicatif, par rapport à son grand prédécesseur. En réalité, il trouve des formules bien à lui, caractéristiques mais nouvelles – même pour un pape – pour communiquer le message. Nous pensons au livre « Jésus de Nazareth », dont nous attendons le second volume et dont nous pouvons espérer avoir un complément dans un troisième volume : un livre à caractère théologique et spirituel, écrit personnellement par un pape théologien est aussi une grande nouveauté de ce pontificat, comme l’est également le livre-entretien. Cela montre certainement la réflexion et la recherche du pape pour trouver des chemins adaptés et aussi en harmonie avec sa personnalité communicante. Je voudrais ajouter aussi les autres formes classiques de sa communication que sont les homélies, les catéchèses et les grands discours. Les homélies, en particulier, caractérisent le service de ce pape : elles sont une grande contribution à la synthèse entre théologie et spiritualité pour l’Eglise d’aujourd’hui. C’est un maître en homilétique pour l’Eglise tout entière ».
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