Selon des sources de sécurité, l’église, la seule à Rafah, était abandonnée depuis deux ans après avoir été incendiée et pillée dans la foulée de la révolte contre le président aujourd’hui déchu Hosni Moubarak. Ces sources n’ont pas exclu que la tentative d’attentat visait également un campement militaire en cours de construction dans le secteur et qui a déjà été attaqué par des islamistes radicaux dans le passé.
Le Sinaï connaît un regain d’instabilité depuis la chute du régime Moubarak en février 2011, avec une intensification des activités de groupes radicaux qui prennent régulièrement l’armée et la police pour cibles.
Cette intervention a eu lieu alors que les coptes-orthodoxes célébraient hier leur premier Noël sous un pouvoir issu des Frères musulmans, dans un climat d’inquiétude face à la montée en puissance de l’islam politique, en dépit des assurances des autorités. « Je ne me sens pas vraiment en sécurité », assure Ayman Ramzi, résumant le sentiment grandissant dans cette communauté. Ayman, 38 ans, évoque la multiplication des déclarations « hostiles » dans certains milieux islamistes radicaux, même si le chef de l’État, Mohammad Morsi, a promis d’être « le président de tous les Égyptiens ».
Une fatwa diffusée depuis plusieurs jours sur des sites Internet par une association proche des fondamentalistes salafistes, « le comité légitime pour les droits et la réforme », dont fait partie le numéro deux de la confrérie des Frères musulmans Khaïrat al-Chater, demande ainsi de ne pas adresser des vœux aux coptes à l’occasion de leurs fêtes.
Tout récemment, le journal indépendant al-Watan a donné la parole à un responsable salafiste, Hicham al-Achri, présenté comme le fondateur d’une « Commission pour la promotion de la vertu et la prévention du vice ». Ce fondamentaliste souhaite aller à la rencontre des coptes devant leurs églises pour les encourager à se convertir à l’islam et réclame que les chrétiennes portent le foulard islamique.
« Je suis vraiment consternée par la multiplication de déclarations réactionnaires de ce genre », déclare Madonna Nagi, étudiante copte de 23 ans, qui s’indigne aussi de la multiplication des déclarations dans la presse ou de personnalités islamistes, pointant du doigt les chrétiens comme les instigateurs de la récente vague de contestation de M. Morsi.
Depuis son élection en juin, le président a promis à plusieurs reprises de garantir les droits et l’égalité de tous les citoyens, sans distinction de religion, et a adressé ses félicitations au nouveau patriarche copte, Tawadros II, intronisé en novembre. Mais ces propos n’ont pas suffi à rassurer les coptes. « Ma sœur a peur pour l’avenir et elle est partie aux États-Unis avec ses enfants, mais je ne veux pas quitter mon pays », affirme Raymond Faez. Cet employé d’une compagnie aérienne évoque toutefois un « malaise général » au sein de la communauté chrétienne.
À Choubra, quartier populaire du Caire où vivent de nombreux chrétiens, des commerçants évoquent des lettres de menaces portant la signature d’islamistes radicaux adressées à la veille de Noël. Comme du temps de Hosni Moubarak, la charia reste la « source principale de la législation », et selon ses détracteurs, la nouvelle Constitution adoptée en décembre pourrait ouvrir la voie à des interprétations radicales de cette loi islamique.