Pour à la fin constater le changement
survenu avec les Nouvelles Technologies de l’Information (NTIC).
« Dans la nuit du 2 au 3 décembre 1552, François Xavier, missionnaire jésuite, meurt
à Malacca, face à la Chine dont il a tant rêvé. Six mois plus tard, son ami et supérieur,
Ignace de Layola, qui ignore la fatale nouvelle, lui écrit pour lui intimer l’ordre
de rentrer en Europe. Il faudra attendre l’automne de 1555 – près de trois ans – pour
que la mort de François Xavier soit connue à Rome ».
« Deux siècles plus tard, en 1763, Donatien Alphonse François, marquis de Sade,
doit quitter Avignon pour regagner Paris ou il doit se rendre en urgence. Pour gagner
du temps il décide de voyager en chaise de poste. Il mettra pourtant six jours
par le moyen le plus rapide de l’époque celui qui servait à transmettre les messages urgents. »
[1]
Deux exemples qui constituent le point de départ de notre réflexion sur l’évolution
survenue dans la longue marche de l’évolution de l’homme dans le domaine
de la communication, ces moyens qui ont transformé l’homme dans sa relation avec le temps
et l’espace arrivant à l’homme digital qui communique à la vitesse de la lumière.
Qui est-ce cet homme digital ? Qu’est-ce qui le caractérise ? Comment on en
est arrivé la ? Où se situe l’Eglise par rapport à cet homme ?
La Comm. détermine les étapes de l’évolution
L’homme digital que nous sommes est la suite de l’homme tribal oral, puis
de celui de l’écriture, de l’imprimé, de la télévision, et maintenant des réseaux.
Ces étapes de l’évolution de la communication incarnent l’évolution même de l’Homme.
La communication, phénomène intrinsèque de l’homme, a toujours été au centre
de l’évolution de l’être humain, et même déterminante sur sa vie, sa pensée et sa
conception des phénomènes qui l’entourent. « On ne peut pas ne pas communiquer,
non parce que ce serait fou ou dangereux, mais simplement impossible »,
clamait l’école de Palo Alto.
A chaque époque correspond le mode de communication qui convient sans
que la puissance du verbe et des idées ne perde ses effets imposants et
fondateurs de l’évolution des sociétés et de l’Histoire.
La Communication par l’oral
La communication orale a distingué les sociétés primitives et a regroupé les
communautés en leur donnant une identité linguistique, une appartenance
à un héritage culturel maintenu par la narration et la tradition exprimées
sur la place publique. Nous pouvons imaginer tribus et communautés
soudées par la tradition et les mythes retransmis d’une génération à une autre.
Le souci de « l’homme oral » « parait être de se conformer le mieux possible
aux règles qui lui sont léguées par la tradition » (Riesmen).
La Communication par l’écrit
Les premières formes d’écritures dans les civilisations connues
(estimés à quelques
4000 ans avant J.C.) tels qu’en mésopotamie ou en Egypte ont concrétisé
l’évolution de l’homme par un mode d’expression au service de ses dieux,
du commerce et de l’expression comme moyen d’évolution et de dépassement
de soi. La connaissance ici devient tangible, évolutive, sujet à débattre.
Survint l’alphabet moderne (quelques 2000 ans avant J.C.), pour fonder une méthode
de langage et soumettre l’oral à l’écrit rendant les sons et les idées prisonniers des lettres.
Les manuscrits commencent à s’entasser constituant un héritage universel
des civilisations et de la pensée humaine.
L’écriture rendra la pensée « mobile » dans l’espace et dans le temps.
Elle va permettre de stocker l’information, établir des documents et fonder
des connaissances scientifiques basées sur l’observation documentée
et le savoir cumulé ouvrant les portes à la transformation de l’homme et de la société.
L’avènement de l’imprimerie
C’est l’imprimerie qui va propager cet héritage culturel banalisant les secrets
de l’écriture gardés longtemps monopole de certaines classes sociales.
La vie intellectuelle et spirituelle va être bouleversée. L’imprimerie
sera à la base de l’essor de la presse écrite qui a posé les bases de la
littérature, de la science et même du fonctionnement de la démocratie.
C’est à cette invention qu’on va imputer les révolutions luthériennes,
françaises et autres avec la propagation des idées contestataires de l’ordre établi.
Elle façonnera les cultures, contribuera à la disparition du latin face aux langues locales plus faciles, étendra le pouvoir féodal et préparera la naissance des Etats nations.
« L’histoire de l’imprimerie est partie intégrante de l’histoire générale de la civilisation.
Ni les événements politiques ou constitutionnels, ni ceux philosophiques,
ne peuvent être complètement saisis sans tenir compte de l’influence de la presse écrite exercée sur eux » (Steinberg, 1965).
Les journaux imprimés vont creuser cette voie depuis le 17eme siècle,
de même que les livres propageant idées et concepts.
La téléphonie : La communication à distance
Le téléphone, à partir de la fin du 19eme siècle, va s’introduire dans la sphère
privée de l’homme et élargir la communication individuelle pour devenir
« un véritable cordon ombilical » qui relie l’individu au monde social et vice versa.
L’instantanéité est devenue permanente. Le téléphone va se distinguer des autres
medias comme moyen puissant de développement.
La radio : communication de masse
C’est la radio qui va briser ce monopole de l’écrit en entrant brusquement
en scène au début du 20eme siècle, faisant virer l’accès à l’information
de l’écriture à l’oral, et s’introduisant dans les foyers et les sphères privées
uniformisant le public sans distinction du niveau d’alphabétisation.
C’est l’oreille qui va prendre le dessus. Ce changement survenu dans
le moyen d’accès à l’information va, parait-il, modifier la relation de l’homme
aux données concrètes.
La radio fut par excellence un media de propagande et marqua l’humanité
par une période des plus violentes à cause de la propagande politique qui
s’en est largement servie. C’est ce qui a fait dire à certains penseurs que
« l’oreille est intolérante ». Les espoirs fondés sur la radio à sa naissance
comme moyen d’éducation et de vulgarisation de la connaissance n’ont pas abouti.
La télévision : l’illusion de la vérité
Deuxième choc de taille pour l’imprimé se fut la télévision, qui va imposer
à l’humanité une nouvelle forme de communication par l’image vivante,
fait entrer le monde dans chaque foyer et transforma l’humanité en ce qu’on appela
« le village global ».
La communication ici aussi va changer de cap, c’est la conviction par l’image
qui s’apparente à la vérité. C’est l’accomplissement du message par tous ses éléments.
L’homme de la TV aura du mal à comprendre que ce qu’il voit sur l’écran
n’est pas toujours la vérité. Il continue toujours à croire en ce qu’il voit,
se transformant ainsi en cible de toute manipulation politique et commerciale possible.
Il a fallu deux grands chocs comme celui des massacres de Timisoara en Romanie
(1989) et la guerre du Golfe pour se rendre compte des grandes manipulations
de l’image et pour que les journalistes eux-mêmes victimes de ces manipulations
en prennent conscience. Des voix se sont alors élevées pour appeler à une
éducation aux medias et pour l’adoption d’une éthique journalistique.
Deux thèmes dont l’importance va s’imposer comme nécessité absolue
pour garantir le bon fonctionnement des medias y compris avec
l’avènement des médias numériques.
Il est facile de constater le recul de la morale dans le domaine journalistique,
partout dans le monde à des degrés différents, ce qui a rendu nécessaire
une certaine déontologie dans les bureaux de rédaction et un enseignement
à l’éthique du métier dans les facultés spécialisées, dans l’espoir de sauvegarder
la vocation du journalisme comme service public.
On aurait cru que c’était l’apogée avec la télévision, la fin de l’évolution
communicationnelle, avec cette représentation symétrique de l’homme
à travers le miroir télévisuel.
Mais voila que les réseaux apparaissent. Dés les années 80, la rencontre
entre l’informatique, le téléphone et la télévision va propulser l’humanité
dans l’âge numérique.
Les étapes historiques de la comm.
– 500.000 ans au moins séparent l’invention du langage de celle de l’écriture,
– 5.000 ans entre la naissance de l’écriture et celle de l’imprimerie (1450),
– 400 ans entre l’imprimerie et le téléphone (1876) et de la radio (1899),
– Seulement 40 ans plus tard la TV émet ses premiers programmes (1940),
– Apres 40 ans naissent le multimédia et les NTIC,
L’histoire des medias nous rappelle qu’aucune nouvelle découverte n’a révélé
sa capacité de changement sur le tas. Il a fallu des décennies à l’imprimerie
pour révéler sa puissance. La radio s’est développée dans une autre voie
qu’on lui avait prévue. La peur qu’on exprimait à l’égard du cinéma et de la
télévision à leur naissance ne s’est pas concrétisée, d’ailleurs les effets du petit
écran a été le sujet de milliers de recherches depuis 60 ans pour comprendre
son impact sans qu’on aboutisse à des résultats définitifs. Comme on doutait
aussi de l’utilité de l’invention de la photocopieuse car on ne savait pas en quoi
ça pouvait se différencier du papier carbone. Même pour l’Internet il a fallu plus
de 20 ans pour passer du service militaire au rôle civil.
Les inventions dans le domaine de la communication ont toujours constitué
un événement fondateur de changements structurels dans la société.
Au delà des « industries culturelles » critiquées par l’Ecole de Francfort,
et accusées de façonner les individus dans des moules au service d’une
idéologie dominante, et leur imposaient des cadres de pensée toute faite.
La Technique modifie la société
Tout au long de l’histoire, les inventions techniques modifiaient la société.
Tel était le cas avec la boussole, la roue, l’imprimerie, l’avion etc.
C’est comme avec les autres medias, la découverte des Nouvelles Technologies
de l’Information et de la Communication (NTIC) va transformer la société dans tous
les domaines lui accordant le nom de « société de communication ».
“Les media, en altérant notre environnement, changent en nous le rapport
entre les sens de la perception et la perception du sens. L’extension d’un
quelconque sens transforme la manière dont nous pensons et
agissons- la manière dont nous percevons le monde. Quand ces rapports
changent, l’homme change.”(McLuhan, 1969)
L’avènement des Réseaux
Aujourd’hui, «c’est incontestablement Internet qui a le plus changé la vie
quotidienne de centaines de millions d’individus. Il n’y avait en 2000
que 400 millions de connectés à Internet. Aujourd’hui, leur nombre
dépasse le quart de la population mondiale. Internet s’est avéré
l’un des outils de communication dont la pénétration a connu la progression
la plus rapide de l’histoire : vingt fois plus vite que le téléphone, dix fois plus
que la radio, trois fois plus que la télévision. La grande rupture, désormais,
est celle qui, dans le monde, oppose les « connectés » aux «non connectés »,
c’est le fossé numérique. A ne pas oublier que la moitie de l’humanité
n’a pas encore accès à ces nouvelles technologies.
Et voila « En moins de vingt ans, la révolution numérique a connu le rythme de progression le plus rapide de l’histoire des techniques. D’ores et déjà, elle a, non seulement changé la vie quotidienne de centaines de millions d’individus dans le monde, mais a commencé à opérer une transformation de l’homme lui-même après avoir transformé son milieu et le rapport qu’il établissait avec ce milieu. C’est à une révolution anthropologique à laquelle nous assistons, donnant naissance à l’Homo numericus ».
Le numérique transforme l’Homme
Le changement survenu parait même plus grand que celui de l’ensemble des medias traditionnels. « L’informatique n’est plus une affaire d’ordinateurs, c’est un mode de vie »[2], disait Negroponte.
A la différence des autres medias, les NTIC entament une transformation totale de la société et touchent tous les domaines sans exception. Nous sommes en pleine révolution qui n’arrête pas de nous étonner avec les séries d’i-phone et i-Pad, les tablettes tactiles, des logiciels et des applications qui transforment notre vie et notre environnement et nos conceptions.
FaceBook n’existait pas il y a 6 ans. Près d’un milliard de membres Aujourd’hui. Twitter aussi s’est imposé comme fil d’information avec plus d’un milliard de messages par semaine. Chaque jour des centaines de milliers de comptes sont créés. Avec You Tube une fenêtre qui donne accès au théâtre monde, musique, films et vidéo-clip…
Une évolution de société sans précédent dans l’histoire de l’humanité. Une évolution tellement neuve qu’on la voit quotidiennement pulser au coeur de chaque événement sans toujours pouvoir en saisir la portée car rien de ce que nous sommes n’échappe plus à l’intervention des nouvelles technologies. Internet concrétise et force la mondialisation sur tous les plans.
« Economie, santé, culture, société, spiritualité, politique, communication, sentiments, apprentissage, jeu, sport, tout se passe comme si chacun de nos rêves ou projets, même les plus fous et visionnaires, pouvait déjà bénéficier d’une technologie innovante pour le concrétiser ou le pousser encore plus avant sur des terres en friche où même l’essentiel reste à découvrir ».
Les transformations sociales
Il est difficile de citer toutes les transformations survenues avec les NTIC :
* Economie : secteurs industriels, secteurs de l’emploi, les marchés financiers à l’échelle de la planète, de même ce qu’on appelle la nouvelle économie, l’économie des réseaux et des « dot.com », arrivant au domaine du commerce. Des magasins numériques à l’échelle de la planète, tels Amazon et e.bay, un client numérique et des activités qui passent par les réseaux. Une économie incarnée par les plus grosses fortunes de la planète, celles de Bill Gates (Microsoft), Ted Turner (medias) et Carlos Slim (téléphonie).
* Loisirs : C’est la deuxième activité de l’homme après le travail. L’Internet est en train de détrôner la télévision. C’est le passe-temps favori, la navigation à volonté entre les jeux, lecture, les films, le chatting, les découvertes, et les hobbies à volonté. Tant « d’activités » simplement en tapotant sur le clavier.
* Politique : On savait que la communication était indispensable au fonctionnement des démocraties. On vient de découvrir que la communication numérique peut faire tomber les dictatures. On l’a vécu avec le « printemps arabe », on le voit avec la censure pratiquée par les régimes autoritaires contre l’accès à internet. Internet devient la passerelle a l’exercice du pouvoir : les adeptes de président Obama sur twitter dépassent 12 millions[3].
* Social, les NTIC redéfinissent les liens sociaux via les sites de rencontre de toutes sortes, la constitution de réseaux sociaux, de clubs, de groupes, à l’image des tribus. Une simple clique nous fait rejoindre un groupe, une autre efface un ami. C’est aussi la connection son et image via Skype. Ce sont les activités étalées en Photos sur Face Book, ou des photos envoyées d’un bout à l’autre du monde en clin d’œil. Le logiciel de photos Instergram enregistre 5 millions de photos chargées par jour.
* Educatif : banques de données, traitement des données, traduction facile et gratuite, les bibliothèques visitées à distance, c’est le savoir à la portée de la main, wikipedia en est l’emblème, une encyclopédie numérique qui « fait figure d’arbre de la connaissance du bien et du mal ».
Googel fait le tri des articles selon nos intérêts pour nous les poster, et le terme « googler » devient significatif de « recherche scientifique, rapide, facile et gratuite ».
* Services : le numérique chambarde tous les domaines des services, les réservations en ligne dans le domaine du tourisme ont atteint dans certains pays 30%.
* Information : Les medias subissent profondément ce changement. La presse sur papier menacée de disparition. Les journaux en ligne atteignent des sommets. Le Journalisme citoyen est né, blogs et commentaires en toute liberté. On en est à « l'ubiquité des médias », un environnement numérique dans lequel l'individu est tour à tour émetteur, récepteur et relais d'information
L’homme digital, grâce à son portable, a les medias du monde entier dans la poche. Structurellement, le numérique brise l’information verticale pour établir une communication horizontale entre les individus.
* culture : Les NTIC permettent un accès aux œuvres culturels de toutes sortes : Musées, musique, films, livres numériques…
D’autres fonctions inattendues des NTIC se sont révélées avec le « printemps arabe » notamment la constitution de réseaux sociaux qui ont contribué au changement social. Ces réseaux jouèrent pleinement leur rôle dans :
– La transmission de l’information.
– La communication des documents et archives.
– La vulgarisation de couverture médiatique.
– La structuration des mouvements revendicateurs.
– La structuration des mouvements des jeunes internautes.
– La structuration des mouvements de protestation.
– La structuration des groupes contestateurs.
– La structuration du mouvement de déstabilisation politique des stratégies de lutte contre les révolutions.
– La structuration du mouvement contre les tentatives de contre –révolution populaire.
– La structuration d’un mouvement contre la politique de la dictature et du contrôle ([4]) des réseaux sociaux. ([5])
Les menaces de la technologie
On aurait cru que les changements apportés par les NTIC ne sont que positifs et ne font qu’améliorer la vie de l’homme en mettant la technologie à son service. Mais c’était oublier les cotés négatifs de ces technologies. La crainte des effets néfastes des medias a toujours existé. On interdisait l’accès aux manuscrits, on craignait la banalisation du savoir avec l’imprimerie, on voyait dans la radio et la télévision les pires moyens de manipulation.
Mais que dire des NTIC avec leur puissance sans mesures avec celle des médias traditionnels ? Certes il est tôt de prédire comment évoluera la société numérique et quelles transformations subira l’homme digital.
– Mais certaines prémisses de la nouvelle société nous révèlent une société tribalisée ou chacun appartient à un groupe, mais en même temps qu’une société planétaire.
– L’homme parait libre sans censure mais aussi dépendant et solitaire.
– Un homme ayant accès à la culture, mais une culture « copy paste ».
– Une abondance dans les données mais un homme incapable de faire le tri et de distinguer le vrai du faux.
– Ce sont les Algorithmes de Googel qui lui imposent la réponse à ses questions.
– C’est toujours la chimère d’accès à la vérité, mais comme avec la télévision une vérité maquillée, manipulée.
– C’est aussi l’uniformisation des cadres de pensées par les super sociétés de production, comme fut le cas pour le cinéma avec Hollyood.
La fin de la vie privée ?
C’est parait-il aussi la fin de la vie privée.
« Des photographies de nos maisons sont disponibles sur Google Earth et accessibles à tous.
Notre smartphone nous suit à la trace.
Notre historique de recherche sur Google reconstitue la trame de notre vie.
Nos images et données dans les groupes de contacts numériques sont fouillées à la loupe par toutes sortes de sociétés pour chercher à nous influencer.
Nos mouvements de comptes sont régulièrement passés au crible par les banques.
Et les gouvernements peuvent espionner quand bon leur semble nos mails et nos conversations sur téléphone portable ». “La vie privée est morte et enterrée. Passez à autre chose”, aurait conseillé un spécialiste dans la matière[6].
Une nouvelle sociabilité
D’autres sont plus optimistes : « Aujourd’hui, le digital est en train de redéfinir les contours d’une nouvelle sociabilité », prédit Thomas Jamet. « Loin d’enfermer les individus, il semblerait que les médias et réseaux sociaux les invitent plutôt à se rencontrer et à apprivoiser l’altérité ». Ainsi, Jamet, prédit quatre « éternels retours » qui peuvent être révélés à l’ère digitale :
– Le retour aux autres et le sentiment de faire partie d’un grand Tout.
– Le retour de Dionysos, dieu du vin, du théâtre et de la fête, via notre position d’homo ludens, les jeux vidéo et les « liturgies pop » auprès desquelles nous allons « communier ».
– Le retour à la pulsion, en ce que le digital rend tout disponible à tout moment. Le pouvoir du tactile et la multiplicité des usages à notre disposition reposeraient sur la concupiscence et l’envie de posséder, proche des ressorts de la publicité, mais démultipliés.
– Le retour au sauvage, une période de grands troubles et incarnent les grandes peurs collectives[7].
Certains prennent le pari que nous entrons dans une civilisation dominée par l’émotion, l’instantanéité, l’interactivité qui risquent de ne donner à la raison le temps de réagir à froid.
L’Eglise face aux défis des NTIC
Face à cette puissance des NTIC, l’Eglise devait réagir. Tout d’abord prendre conscience de l’ampleur du défi à relever, puis mettre la puissance des nouveaux medias à ses cotés et surtout éviter les cotés néfastes, notamment ce risque d’esclavage technologique qui pèse sur l’homme.
Le pape Jean-Paul II envoyait officiellement la lettre apostolique « Ecclesia Oceania » via Internet. Ce fut une première dans la vie de l’Église. Un signal fort pour illustrer à quel point l’Internet est devenu un moyen incontournable en tant que média à l’intérieur même de la vie de l’Église.
Le message du pape Jean Paul II pour la 36eme journée mondiale des communications sociales daté du 12 mai 2002 portera le titre de "Internet: un nouveau carrefour pour l'annonce de l'Evangile".
Ce message mettra l’accent sur le rôle de évangélisateur de l’Eglise entamé par les Apôtres en soulignant que ce rôle a pris plusieurs formes allant chaque fois avec les nouvelles découvertes : « A présent, alors que la révolution en matière de communication et d'information bat son plein, l'Eglise se trouve indubitablement face à un nouveau départ décisif », avec ce « nouveau forum » que constitue l’Internet.
Le message souligne que « comme toutes les nouvelles frontières des autres époques, celle-ci également est riche de dangers et de promesses ». Pour l'Eglise, « le nouveau monde du “cyberspace” est une exhortation à la grande aventure d'utiliser son potentiel pour proclamer le message de l'Evangile … Il s’agit d’un instrument et non d’une fin en soi ».
Et d’expliquer : « Internet peut offrir de magnifiques opportunités d'évangélisation s'il est utilisé avec compétence et une conscience précise de ses forces et de ses faiblesses… il permet une rencontre initiale avec le message chrétien, en particulier parmi les jeunes, qui se tournent de plus en plus vers l'univers du “cyberspace” comme vers une fenêtre ouverte sur le monde…. C'est pourquoi, j'exhorte toute l'Eglise à franchir courageusement ce seuil, à prendre le large dans les profondeurs d'Internet… »
« La technique est moins importante que les hommes ou que la société, l'important, c'est le projet humain qui est derrière», écrivait Dominique Wolton dans un livre consacrée à Internet.
L’humanité est au milieu d’une révolution technologique sans précèdent. L’homme vit une transformation totale dont on a du mal à saisir les portées exactes. La maîtrise de cette technologie est indispensable pour continuer à être au centre des intérêts humains. L’Eglise ne pourrait pas échapper à constituer des paroisses sur FaceBook, ni éviter de twitter ses cérémonies, ni constituer des clubs de dialogue et de partage sur Internet. La transformation de l’Homme est en marche et la société digitale n’a pas encore atteint sa forme définitive, il faut alors se placer au centre de cette révolution pour ne pas en être exclu.
[1] – Woodrow, Alain. “Information Manipulation”. Ed. Du Felin. Paris 1991.
Nicholas NEGROPONTE, fondateur et directeur du Laboratoire des Médias au M.I.T. (Massachussets Institute of Technology) à Boston – [2]
[3] – As Safir 2 mars 2012
[4] Le contrôle du flux de la communication virtuelle.
[5] Poinsot (Thomas), « Les réseaux sociaux d’entreprises: repère pour un nouveau monde collaboratif » , in D.S.I,2010, vol 47,n° 3 , pp 26-30
[6] – Scott McNealy[6], cofondateur de Sun Microsystems, Timothy Garton Ash, The Guardian.. 12.10.2010
[7] – Publié le 5 décembre 2011, par Aymeric Bourdin
Georges Sadaka