Rivale de l’Université de Heidelburg pour le titre de la plus ancienne université d’Allemagne, cette institution a pour vocation « l’expérimentation par le biais de la connaissance et des programmes d’études », explique Mme Shaebler. Elle souligne ainsi l’originalité du département dont elle a la charge, qui tente d’approfondir l’étude de l’histoire allemande et européenne, mais aussi celle du Moyen-Orient et d’autres régions du monde. Parallèlement, Mme Shaebler valorise le mélange des nationalités qui affluent à cette université pour y poursuivre les études. Ce pluralisme rejaillit en somme dans « la nouvelle perspective » exploitée à Erfurt, celle de « l’anthroplologie historique qui constitue un très bon partenaire académique pour la sociologie au niveau de ce double programme », conclut Mme Shaebler.
Opportunités de bourses
Dans l’audience, Leila, étudiante de sociologie à l’USJ, absorbe ces informations avec enthousiasme. « C’est l’Europe qui m’attire, l’ouverture, la découverte d’un autre monde… n’importe quoi pour sortir de là ! » confie-t-elle à L’Orient-Le Jour avec une amertume qui ne parvient pas à tarir ses espoirs jeunes et vivaces. Ainsi, ce sont les programmes de bourse qui interpellent surtout Leila, des programmes qui seront mis en œuvre au niveau du nouveau master, mais dont peut bénéficier, de manière générale, tout étudiant libanais désireux de poursuivre ses études en Allemagne. En effet, c’est le DAAD, ou l’Institut allemand pour les services d’échanges, implanté au Liban depuis plusieurs années, qui parraine les voyages des étudiants en Allemagne, les oriente dans leur choix, encadre leur séjour, leur assure des cours intensifs d’allemand pour optimiser leurs aptitudes… et surtout leur offre des bourses d’études, étant « le plus grand fonds académique allemand en matière de bourses », affirme Julian Paenke, responsable du DAAD au Liban. Et de conclure : « La pièce la plus importante de tout ce puzzle demeure les étudiants ! » Effectivement, deux étudiants allemands, Anne et Robert, poursuivant des études d’histoire du Moyen-Orient à Erfurt, venus assister à la conférence, incarnent l’ébauche de l’échange libano-allemand escompté. « Nous apprécions énormément l’atmosphère d’accueil dans ce pays, qui est très rafraîchissante », confient-ils, en expliquant qu’ils entament un séjour de plusieurs mois au Liban pour y apprendre l’arabe.
« Dépasser le barrage de la langue »
Toutefois, la maîtrise de l’allemand ou de l’arabe n’est pas prérequise pour les candidats au nouveau master, mais ceux-ci devraient, de toute évidence, y porter un certain intérêt, pouvant s’exprimer par exemple, pour les étudiants libanais, par leur inscription à un cours d’allemand au Goethe Institut, en guise de préparation au master. D’ailleurs, les langue qui seront utilisées pour les cours et la rédaction éventuelle du mémoire ne sont ni l’allemand ni l’arabe, mais l’anglais et le français. « Nous avons tenté de dépasser la barrière de la langue », confie Mme Khoury, et cette tendance fait écho à l’interdisciplinarité du programme.
À l’origine du master, un voyage…
L’initiatrice discrète de ce partenariat est sans doute Gabriele Bunzel Khalil, enseignante de sociologie des conflits à l’USJ. Entre ses origines allemandes, sa vie au Liban et ses études à Paris, elle parvient à conjuguer discipline et délectation, comme en témoignent ses étudiants. En 2009, elle organise, avec Mme Khoury, un voyage d’études en Allemagne pour une quinzaine d’étudiants de sociologie et de droit inscrits à son cours. L’itinéraire, du sud-ouest au nord-est de l’Allemagne, aura permis la découverte des cités universitaires de Heidelburg et d’Erfurt, des villes de Francfort et de Berlin, ainsi que des contrées qui parsèment le patrimoine allemand. Les échanges avec des universitaires, enseignants et chercheurs, auront permis la découverte du « regard que portent les autres sur le Proche-Orient », souligne Mme Khalil. Venu témoigner de ce voyage, Thomas Chahine, diplômé en droit, évoque « la chance et le plaisir d’avoir visité la cité de Max Weber (Weimar) », rappelant ainsi le legs des intellectuels allemands. Pour Mme Khalil, en somme, « si on a envie de rapprocher l’Allemagne et le Liban, et plus largement l’Europe et le Proche-Orient », ce sont des programmes d’études semblables au nouveau master proposé qui permettront aux efforts de réflexion d’aboutir, aussi divergents puissent-ils paraître.