de notre vie, de nos paroisses, – quel dommage, toutes ces paroisses fermées ! – des mouvements, des associations, et pour « sortir » à la rencontre des autres, nous faire proches pour apporter la lumière et la joie de notre foi."
Le pape a en effet tenu la première audience générale de son pontificat, ce mercredi saint, 27 mars 2013, en présence de quelque 15 000 visiteurs, dont des milliers de jeunes de l'"UNIV2013".
Il a souligné qu'il recevait "le témoin" des mains de Benoît XVI auquel il a à nouveau rendu un hommage appuyé et il a annoncé qu'il poursuivrait les catéchèses sur l'Année de la foi.
Des collaborateurs du pape ont ensuite lu les synthèses de la catéchèse du pape ainsi que ses salutations en différentes langues qu'il a prononcées également en italien avant leur traduction en sept langues: français, anglais, espagnol, portugais, allemand, arabe et polonais.
Le pape aussi lancé son premier appel international, en demandant la fin immédiate des hostilités en République Centrafricaine.
Première catéchèse du pape François
Frères et sœurs, bonjour !
Je suis heureux de vous accueillir pour ma première audience générale. Je reçois le « témoin » des mains de mon prédécesseur bien-aimé, Benoît XVI, avec beaucoup de reconnaissance et de vénération. Après Pâques, nous reprendrons les catéchèses sur l’Année de la foi. Aujourd’hui, je voudrais m’arrêter un peu sur la Semaine sainte. Avec le dimanche des Rameaux, nous avons commencé cette semaine, centre de toute l’année liturgique, dans laquelle nous accompagnons Jésus dans sa Passion, dans sa mort et dans sa résurrection.
Mais que peut vouloir dire, pour nous, vivre la Semaine sainte ? Que signifie suivre Jésus sur le calvaire dans son chemin vers la Croix et la résurrection ?
Au cours de sa mission terrestre, Jésus a parcouru les routes de la Terre Sainte ; il a appelé douze personnes simples pour qu’elles restent avec lui, qu’elles partagent son chemin et poursuivent sa mission ; il les a choisies parmi le peuple plein de foi dans les promesses de Dieu. Il a parlé à tous, sans distinction, aux grands et aux humbles, au jeune homme riche et à la pauvre veuve, aux puissants et aux faibles ; il a apporté la miséricorde et le pardon de Dieu ; il a guéri, consolé, compris ; il a donné l’espérance ; il a apporté à tous la présence de Dieu qui s’intéresse à chaque homme et à chaque femme comme le font un bon père et une bonne mère vis-à-vis de chacun de leurs enfants. Dieu n’a pas attendu que nous allions à lui, mais c’est lui qui est venu vers nous, sans calcul, sans limite. Dieu est comme ça : lui, il fait toujours le premier pas, il vient vers nous. Jésus a vécu la réalité quotidienne des gens les plus communs : il s’est ému devant la foule qui était comme un troupeau sans berger ; il a pleuré devant la souffrance de Marthe et de Marie à cause de la mort de leur frère Lazare ; il a appelé un publicain à être son disciple ; il a aussi subi la trahison d’un ami. En lui, Dieu nous a donné l’assurance qu’il est avec nous, au milieu de nous. « Les renards, a dit Jésus, ont des tanières et les oiseaux du ciel ont des nids ; le Fils de l'homme, lui, n'a pas où reposer la tête » (Mt 8, 20). Jésus n’a pas de maison parce que sa maison, ce sont les gens, c’est nous ! Sa mission est d’ouvrir à tous les portes de Dieu, d’être la présence d’amour de Dieu.
Au cours de la Semaine sainte, nous vivons le sommet de ce chemin, de ce dessein d’amour qui parcourt toute l’histoire des relations entre Dieu et l’humanité. Jésus entre à Jérusalem pour faire le dernier pas, dans lequel il récapitule toute son existence : il se donne totalement, il ne garde rien pour lui, pas même sa vie. Lors du dernier repas, avec ses amis, il partage le pain et leur donne le calice « pour nous ». Le Fils de Dieu s’offre à nous, il remet entre nos mains son Corps et son Sang pour être toujours avec nous, pour habiter au milieu de nous. Et au Jardin des Oliviers, comme au cours du procès devant Pilate, il n’oppose pas de résistance, il se donne ; il est le Serviteur souffrant préfiguré par Isaïe qui se dépouille lui-même jusqu’à la mort (cf. Is 53, 12).
Jésus ne vit pas cet amour, qui mène au sacrifice, de manière passive ou comme une fatalité ; certes, il ne cache pas le trouble humain profond qui l’habite face à la mort violente, mais il se remet au Père avec une pleine confiance. Jésus s’est livré volontairement à la mort pour correspondre à l’amour de Dieu le Père, en parfaite union avec sa volonté, pour manifester son amour pour nous. Sur la croix, Jésus « m’a aimé et s’est livré pour moi » (Ga 2, 20). Chacun de nous peut dire : Il m’a aimé et s’est livré pour moi. Chacun de nous peut dire : « pour moi ».
Que signifie tout ceci pour moi ? Cela signifie que cette route est aussi la mienne, la tienne, la nôtre. Vivre la Semaine sainte en suivant Jésus, pas seulement avec un cœur bouleversé; vivre la Semaine sainte en regardant Jésus veut dire apprendre à sortir de nous-mêmes – comme je le disais dimanche dernier -, pour aller à la rencontre des autres, vers les périphéries de l’existence, pour aller les premiers à la rencontre de nos frères et sœurs, surtout de ceux qui sont le plus loin, ceux qui sont oubliés, ceux qui ont davantage besoin d’être compris, d’être consolés, d’être aidés. On a tant besoin d’apporter la présence vivante de Jésus miséricordieux et riche en amour !
Vivre la Semaine sainte, c’est entrer de plus en plus dans la logique de Dieu, dans la logique de la Croix, qui n’est pas d’abord celle de la douleur et de la mort mais celle de l’amour et du don de soi, qui donne la vie. C’est entrer dans la logique de l’Evangile. Suivre, accompagner le Christ, rester avec lui, exige de « sortir », « sortir ». Sortir de soi, d’une manière lasse et routinière de vivre sa foi, de la tentation de s’enfermer dans ses propres schémas qui finissent par fermer l’horizon de l’action créatrice de Dieu. Dieu est sorti de lui-même pour venir au milieu de nous, il a dressé sa tente parmi nous pour nous apporter sa miséricorde qui sauve et qui donne l’espérance. Nous non plus, si nous voulons le suivre et demeurer avec lui, nous ne devons pas nous contenter de rester dans l’enclos des quatre-vingt-dix-neuf brebis, nous devons « sortir », chercher avec lui la brebis perdue, celle qui est le plus loin. Rappelez-vous cela : sortir de nous-mêmes, comme Jésus, comme Dieu est sorti de lui-même en Jésus et Jésus est sorti de lui-même pour nous tous.
On pourrait me dire : « Mais, mon Père, je n’ai pas le temps », « j’ai tant à faire », « c’est difficile », « qu’est-ce que je peux faire avec mes pauvres forces, et avec mon péché, et avec tant d’autres choses ? » Souvent, nous nous contentons de dire quelques prières, d’une messe du dimanche distraite et peu régulière, d’un geste de charité, mais nous n’avons pas ce courage de « sortir » pour apporter le Christ. Nous sommes un peu comme saint Pierre. A peine Jésus a-t-il parlé de passion, de mort et de résurrection, de don de soi et d’amour envers tous, que l’apôtre le prend à part et lui fait des reproches. Ce que dit Jésus bouscule ses plans, paraît inacceptable, met en danger les sécurités qu’il s’était construites, son idée du Messie. Et Jésus regarde ses disciples et il adresse à Pierre peut-être l’une des paroles les plus dures des évangiles : « Passe derrière moi, Satan ! Car tes pensées ne sont pas celles de Dieu, mais celles des hommes ! » (Mc 8, 33). Dieu pense toujours avec miséricorde ; n’oubliez pas cela. Dieu pense toujours avec miséricorde : il est notre Père miséricordieux ! Dieu pense comme le père qui attend le retour de son fils et qui va à sa rencontre, il le voit venir alors qu’il est encore loin… Qu’est-ce que cela signifie ? Que tous les jours, il allait voir si son fils était de retour à la maison : voilà notre Père miséricordieux. C’est le signe qu’il l’attendait de tout son cœur, de la terrasse de sa maison ; Dieu pense comme le Samaritain qui ne passe pas près du malheureux avec pitié, ou en regardant de l’autre côté, mais qui le secourt sans rien demander en échange ; sans demander s’il était juif, païen, ou samaritain, s’il était riche ou pauvre : il ne demande rien. Il ne pose pas ce genre de questions. Il ne demande rien. Il lui vient en aide : Dieu est comme ça. Dieu pense comme le berger qui donne sa vie pour défendre et sauver ses brebis.
La Semaine sainte est un temps de grâce que le Seigneur nous donne pour ouvrir les portes de notre cœur, de notre vie, de nos paroisses, – quel dommage, toutes ces paroisses fermées ! – des mouvements, des associations, et pour « sortir » à la rencontre des autres, nous faire proches pour apporter la lumière et la joie de notre foi. Toujours sortir ! Et cela avec amour et avec la tendresse de Dieu, dans le respect et la patience, sachant que nous, nous apportons nos mains, nos pieds, notre cœur, mais qu’ensuite c’est Dieu qui les guide et qui rend féconde chacune de nos actions.
Je vous souhaite à tous de bien vivre ces journées en suivant le Seigneur avec courage, en apportant un rayon de son amour à ceux que nous rencontrons.
Traduction de Zenit, Hélène Ginabat