La cérémonie, organisée par l’Amicale des anciens élèves de Jamhour et par la Rencontre islamo-chrétienne « Ensemble autour de la Vierge Marie », a revêtu cette année un éclat particulier en raison de la présence du patriarche maronite, Mgr Béchara Raï, qui s’est adressé à l’assemblée et a participé à l’invocation commune finale.
Durant la rencontre, deux nouvelles demandes publiques ont été introduites par les organisateurs : la création d’un ministère du Dialogue islamo-chrétien, proposition bien accueillie semble-t-il par le chef de l’État, et l’instauration d’une Journée mondiale du dialogue entre les religions, le 25 mars.
Un timbre commémoratif de la fête sera également imprimé, et peut-être un dessin qui ornerait la monnaie nationale, apprend-on.
La ministre Marwan Kheireddine a représenté les trois présidents à la cérémonie. Parmi les invités de marque figuraient également le nonce apostolique, ainsi que le président de la Fondation maronite dans le monde, Michel Eddé.
La Fatiha et le Pater
La cérémonie a débuté sur un fond de cloches et d’appels du muezzin qui, à l’unisson, ont fait vibrer les cœurs ! Immédiatement après, toute l’assemblée entame la Fatiha et le Pater. Suit un duo de prières chanté par cheikh Khaled Yamout et père Amid Maaz.
Un message du président de la République, Michel Sleiman, est ensuite lu par le président de l’Amicale des anciens, Nagi Khoury.
« Votre rencontre islamo-chrétienne reflète la composition plurielle du Liban qui constitue un modèle pour l’avenir du monde et présente une alternative à l’extrémisme, au terrorisme, à la violence (…) Je prie le Très-Haut afin qu’il protège le Liban, la nation arabe et le monde entier », affirme en particulier le message.
Raï : Modèle de pluralisme
Intervenant au cours de la cérémonie, le patriarche Raï affirme pour sa part « qu’en prenant la décision de consacrer le 25 mars fête nationale commune, l’État assure que le Liban est un pays message, un modèle de pluralisme religieux et culturel (…), chaque communauté constituant une valeur ajoutée à notre pays et à notre message ».
Dans son mot d’accueil, Nagi Khoury déclare : « Notre message est une richesse. Avec cette fortune, nous sommes capables de faire du Liban une nation modèle pour l’unité, le dialogue et l’ouverture, grâce à notre diversité et malgré nos différences. Aujourd’hui, plus que jamais il est demandé á tous les Libanais de vivre le message avec responsabilité, sérieux et compétence. »
Sion
À son tour, le père Bruno Sion s.j., recteur de Jamhour, se dit heureux d’accueillir cette 6e rencontre, et note : « Nous sommes dépassés par les fruits de notre initiative ; le 25 mars ne nous appartient plus, c’est un bien commun au peuple libanais. »
Suit un duo enchanteur de Samar Salamé (soprano) et de Matteo Khodr (unique contre-ténor au Moyen-Orient). Venus spécialement de Paris, ils chantent à la perfection un poème écrit pour l’occasion.
Cheikh Mohammad Nokkari, secrétaire général de la rencontre et juge auprès du tribunal chérié de Beyrouth, estime que « si la Vierge Marie avait été présente parmi nous ce soir, nous aurions pu lire sur son visage sa tristesse de voir le tourbillon de conflits et de tensions qui sévit dans notre pays (…) Marie n’aurait pas manqué de nous guider aussi pour mieux conserver notre système démocratique et multiconfessionnel, qui fait du Liban un message et un modèle de cohabitation ».
Dans une allusion évidente à la Syrie, cheikh Nokkari souligne : « La Vierge Marie aurait appelé encore les dirigeants des nations en conflit à accorder la sécurité et la démocratie aux peuples en quête de changements, de liberté et de paix ». Geste remarqué, et somme toute bien rare, le juge chérié se désolidarise publiquement de l’auteur de l’attentat de Toulouse et de l’islam qu’il représente.
Plusieurs interventions suivent : cheikh Ghassan Abou Diab explique l’archange Gabriel chez les druzes ; Dr Hosn Abboud et sayyed Jaafar Mohammad Hussein Fadlallah esquissent un portrait de Marie ; cheikh Wajdi Amin al-Jurdi déclame un poème. Après divers chants religieux entonnés par les chorales de NDU, Mabarrat et Fayhaa, la voix sublime de Jahida Wehbé emporte l’assemblée et la prolonge dans un monde de ferveur. Vient ensuite la prière d’intercession commune, récitée harmonieusement par 17 hommes de religion, dont le patriarche maronite.
Pour clôturer la cérémonie, une ambiance fervente et joyeuse accueille le chant final de louange écrit et composé spécialement pour l’occasion par trois professeurs du collège de Jamhour. Un chant rythmé, où les cadences sur les mots soulignent leur importance : « Jamais nos querelles ne porteront sur Dieu ! »
Par ailleurs, l’association « Ensemble autour de Marie » et le groupe « Guérison des blessures de l’histoire » ont organisé dimanche soir une rencontre au « Jardin du pardon », dans le centre-ville, face à la chapelle « Nourieh ».
Marlene AOUN FAKHOURI
L'orient le jour