« l’homme, créé à l’image et ressemblance de Dieu, est en attente de le connaître ». Et « l’activité missionnaire de l’Église repose sur cette conviction ».
Mgr Jacques Perrier, ancien évêque de Tarbes-Lourdes, offre aux lecteurs de Zenit une méditation sur le mystère de la Visitation de la Vierge Marie à Elisabeth, célébrée le 31 mai.
« L’enfant tressaillit de joie »
Dans les livres liturgiques, l’Annonciation est rangée dans les « fêtes du Seigneur » et la Visitation dans les « fêtes de la Vierge Marie ». L’inverse serait tout aussi logique. Car l’Annonce est faite à Marie et son « oui » n’est pas pour rien dans l’Histoire du Salut. La Visitation, elle, pourrait être considérée comme une fête du Seigneur puisque c’est sa présence dans le sein de Marie qui déclenche le tressaillement de Jean, la bénédiction prononcée par Élisabeth et la réponse de la Vierge, sous forme de « Magnificat ».
Dans sa Lettre encyclique sur l’Eucharistie (2003), le pape Jean Paul II osait appeler Marie le « premier tabernacle de l’Histoire ». Ce qui importe dans le tabernacle, c’est le Saint-Sacrement.
Quelques mois après la Visitation, l’Enfant naîtra dans la nuit de Bethléem. Mais, dès sa conception dans le sein de la Vierge Marie, il entre dans le monde. Quand sa mère part visiter Élisabeth, lui-même vient à la rencontre de celui qui « préparera ses voies » (cantique de Zacharie).
Le récit de la Visitation pourrait être lu en parallèle avec le Prologue de l’Évangile selon saint Jean : à deux reprises, le Prologue mentionne la mission préparatoire de Jean, le Précurseur.
L’enfant de Zacharie et d’Élisabeth tressaille de joie : il salue l’accomplissement des promesses. Comme le dira le vieillard Syméon, Jésus est « la gloire d’Israël » et tous ceux qui attendaient « la consolation d’Israël » se réjouirent de sa venue.
« Après avoir, à maintes reprises et sous maintes formes, parlé jadis aux Pères par les prophètes, Dieu, en ces jours qui sont les derniers, nous a parlé par le Fils, resplendissement de sa gloire, effigie de sa substance » (Hébreux 1, 1-3). Pour l’instant, le Fils de Dieu est caché dans le sein de sa mère mais le futur prophète a perçu sa présence. Il est l’ami de l’époux (Jean 3, 29) qui se réjouit parce que le jour des noces est arrivé.
La scène de la Visitation préfigure ce que dira Jésus : « Je ne suis pas venu abolir, mais accomplir. » Jésus vient inaugurer une « création nouvelle », mais l’Histoire du Salut ne commence pas avec lui. Un sillon particulier a été creusé en Israël depuis l’appel d’Abraham : Jésus est l’aboutissement de cette préparation.
Mais, comme le dit Paul aux habitants d’Iconium (Actes 14, 17), « Dieu n’a pas manqué de se rendre témoignage » en dehors d’Israël. Dans la Prière eucharistique IV, le prêtre dit : « … Tu es venu en aide à tous les hommes pour qu’ils te cherchent et puissent te trouver. » Le même saint Paul parle de la création tout entière, « en attente ».
L’activité missionnaire de l’Église repose sur cette conviction : l’homme, créé à l’image et ressemblance de Dieu, est en attente de le connaître. Certes, le péché a tout brouillé et l’accueil de la Révélation demande toujours une conversion. Des ruptures sont nécessaires. Mais les catéchumènes en témoignent : la rencontre du Christ exauce en eux une attente parfois très ancienne. Le Christ n’est pas seulement la gloire d’Israël ; il est aussi « la Lumière qui éclaire les nations », autrement dit les païens.
Le récit de la Visitation est riche de bien d’autres sens. Mais cette lecture a été proposée dans l’esprit de l’Année de la Foi et de la Nouvelle Évangélisation. Dans le cycle liturgique, après l’Épiphanie et la Pentecôte, la Visitation pourrait être la troisième fête de la Mission.
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