Crise financière, brutal ralentissement économique, baisse de la consommation des ménages : depuis quelques semaines, les signaux inquiétants se multiplient pour les entreprises. Face à des lendemains qui s'annoncent difficiles, celles-ci sont contraintes de passer au crible leurs projets d'investissements.
En particulier, la publicité et le marketing, premiers budgets à être mis sur la sellette lorsque la conjoncture s'obscurcit. Reporter une campagne de promotion ou tout simplement s'en passer constitue en effet une mesure facile et rapide à prendre. Dans ce contexte, les prévisions du marché publicitaire sont revues à la baisse.
Ainsi France Pub (groupe Hersant Media) a revu sa copie mardi 4 novembre. Il prévoit un repli de 1,1 % des investissements publicitaires dans les grands médias (presse, télévision, radio, affichage, Internet et cinéma) en France en 2008. En mars, il estimait encore que le marché publicitaire français progresserait de 1,5 %.
TOUS LES MÉDIAS SONT TOUCHÉS
Certains fabricants de biens de consommation ont donné le "la" à cette inversion de tendance, après avoir constaté une chute de leurs ventes en août. Ils ont immédiatement réagi en réajustant leurs investissements marketing. Puis, le système bancaire s'est mis à vaciller, le marché immobilier a marqué le pas et les ventes d'automobiles ont commencé à s'essouffler.
Pour France Pub, le constat est clair. Le marché français s'inscrit dans une tendance baissière. Et même les investissements dans le hors média (comme les envois de courrier ou de mail par exemple) devraient marquer le pas en 2008, avec une quasi stagnation à 0,1 %. La tendance devrait se prolonger en 2009, malgré la faible visibilité sur la conjoncture. France Pub anticipe une baisse de 1,9 % des investissements publicitaires dans les grands médias l'an prochain. Mais également un recul de 0,6 % des dépenses dans le hors médias. Toutefois, Xavier Guillon, directeur des études du Groupe Hersant Media, tient à relativiser cette évolution conjoncturelle, en considérant que même si la tendance est négative, il n'y a pas d'effondrement du marché.
Pratiquement tous les médias sont touchés par la réduction des budgets de communication des entreprises. Même et surtout la télévision, jusqu'alors un des moteurs du marché. La baisse des audiences des grandes chaînes hertziennes, la concurrence accrue des chaînes de la TNT, la nouvelle grille tarifaire de France Télévisions et l'annonce de l'arrêt de la publicité sur les chaînes publiques bousculent la donne. Globalement, les investissements publicitaires en télévision devraient être en recul de 3,9 % en 2008 et de 4,2 % en 2009. La réduction des investissements des annonceurs de la grande consommation mais aussi des banques et assurances a un impact direct.
De plus, en 2007, la télévision avait bénéficié de l'arrivée de la grande distribution autorisée à faire sa promotion sur le petit écran. Ce secteur qui reste l'un des plus dynamiques en 2008 a réajusté ces investissements en faveur des autres médias comme la presse quotidienne, la radio et l'affichage. Malgré cet apport, la presse et la radio souffrent également. L'exception vient de l'affichage qui devrait rester sur une croissance positive cette année et une quasi stagnation en 2009.
Autre fait marquant, le ralentissement de la progression des investissements sur Internet. Elle devrait tout de même atteindre 23,4 % en 2008 et 16,2 % en 2009. Le ralentissement est surtout sensible pour les publicités sous forme de bandeaux ou bannières, alors que les liens sponsorisés, le marché de prédilection de Google, résistent mieux. Les résultats trimestriels de Google publiés mi-octobre avaient d'ailleurs rassuré les marchés. Le chiffre d'affaires a progressé de 34 % en un an.
De leur côté, les groupes publicitaires redoublent de prudence. "Nous pensons que notre industrie devra affronter une fin d'année 2008 tendue et donc une contraction de la croissance pour le quatrième trimestre et un ralentissement marqué en 2009", a prévenu Maurice Lévy, président de Publicis. ZenithOptimedia, filiale de Publicis, avait d'ailleurs également revu, début octobre, ses prévisions du marché publicitaire mondial à la baisse, tablant sur une croissance de 4 % au lieu de 6 % espérés initialement.
Le Monde 05.11.2008