En réalité, la France silencieuse ne veut pas de cette loi.
Monseigneur Tony Anatrella, psychanalyste et spécialiste en psychiatrie sociale, Consulteur du Conseil Pontifical pour la Famille et du Conseil Pontifical pour la Santé, a été parmi les premiers spécialistes au début des années 1990 à alerter l’opinion publique sur les revendications en faveur du « mariage » homosexuel et de l’adoption des enfants. À l’époque on croyait naïvement que cela n’arriverait jamais en France. Et pourtant, nous y sommes ! Il suffit de lire ou de relire les ouvrages de Mgr Anatrella pour y découvrir tous les arguments qui sont repris fort heureusement par ceux qui refusent cette loi du « mariage pour tous » : La différence interdite et Époux, heureux époux, chez Flammarion, La tentation de Capoue aux éditions Cujas et Le règne de Narcisse aux Presses de la Renaissance qui vient d’être réédité. Ce livre est également édité en audiolivre aux éditions Saint-Léger-Production. Et enfin, rappelons également le dossier publié sous sa signature dans Documents Épiscopat sur le thème Mariage et homosexualité n° 9/2004 qui est d’une grande actualité.
Monseigneur Tony Anatrella a accepté de répondre aux questions de Zenit au lendemain de la manifestation organisée à Paris ce dimanche 27 janvier 2013 en faveur du projet gouvernemental.
Zenit – Des associations homosexuelles, des partis politiques et des syndicats ont appelé à manifester ce dimanche pour soutenir la loi du « mariage pour tous » que représente cette mobilisation ?
Monseigneur Anatrella – Nous savons déjà que le nombre de personnes est largement inférieur à celui du 13 janvier 2013. La police annonce 125.000 participants et pour les organisateurs ils seraient 400.000. La manifestation était pourtant clairsemée dans les rues, là où sur leur propre itinéraire les marcheurs pour le retrait du projet de la loi avançaient serrés les uns contre les autres et souvent bloqués avant de pouvoir avancer. Nous avons d’ailleurs assisté à une manipulation des chiffres annonçant 340.000 personnes (repris généreusement pas les médias) alors que le nombre de participants a pu être évalué de façon mathématique par les meilleurs spécialistes entre au minimum 800.000 personnes à 1.200.000. Il s’agit d’une volonté politique de revoir les chiffres à la baisse motivée par le conditionnement idéologique imposé par le pouvoir politique avec la complicité de certains médias qui font de la désinformation. Les chaînes d’information en continu n’ont pas voulu annoncer des chiffres de manifestants qui défilaient de la Place Denfert-Rochereau à la Bastille, mais soulignaient qu’ils étaient des milliers et tenaient un discours très valorisant là où le 13 janvier leur discours minimisait les chiffres. Si la Place de la Bastille était relativement remplie, l’espace ne représente pas l’importance de la foule présente sur le Champ de Mars (qui contient entre 800.000 à 1.000.000 de personnes). Mais ce dimanche 27 janvier, le jeu des caméras montrant une foule compacte, a faussé l’approche de la réalité ; et ce n’est que vers 18h30 que les premiers chiffres ont été publiés.
Zenit – Quelle analyse peut-on faire de cette moindre mobilisation ?
Ce projet de loi n’est pas la priorité des français. Il y a d’autres urgences et d’autres nécessités. L’argument de l’égalité est une illusion car il n’y a pas d’égalité en ce domaine, ce qui ne fait pas pour autant des personnes de même sexe des « sous-citoyens » parce que le mariage n’a rien de commun avec leur situation. Ces abus de langage montrent que ceux qui les manient n’entendent rien au sens du mariage … et encore davantage quand ils ne sont pas mariés eux-mêmes pour des raisons psychologiques. À entendre le rassemblement des « people intellectuels » au Théâtre Marigny le dimanche soir, il n’est pas étonnant de découvrir que les discours manifestent l’ignorance du sens du mariage. Il est détourné de sa finalité et l’instrumentalisé pour banaliser l’homosexualité. Or le « couple » homosexuel n’existe pas.
Zenit – Pourtant les sondages semblent favorables à ce mariage ?
Habitué à rencontrer de très nombreuses personnes durant les semaines récentes dans tous les milieux et à donner des conférences sur la question à Paris et en province, je ne comprends pas toujours la conclusion des sondages qui affirme que 63% sont pour le « mariage » homosexuel alors que dans la réalité ce point de vue n’est pas aussi souligné. Les conférences réunissent entre 300 et 900, voire même mille personnes à chaque fois. Et les conférenciers sont nombreux à s’exprimer sur le sujet et regroupent facilement le même nombre d’auditeurs à leur conférence. En regardant de plus près les sondages et la façon dont les questions sont posées, de nombreuses confusions apparaissent.
Faisons quelques hypothèses. Les personnes qui répondent à ces interrogatoires téléphoniques mélangent le respect des personnes homosexuelles, avec leur reconnaissance sociale grâce au mariage. Ils retiennent également l’institution matrimoniale comme une façon d’intégrer des personnes et de ne pas être rejetant. Enfin le culte de la non-discrimination, qui n’a rien à voir avec le sens du respect d’autrui, exerce une sorte de surmoi social qui empêche de penser et encore davantage de penser l’homosexualité. Elle est devenue un objet tellement idéal qu’il est interdit d’y réfléchir sauf à justifier le phénomène par tous les moyens. C’est pourquoi, j’avais parlé de La différence interdite (Flammarion) puisque le problème essentiel de ce temps est la négation de la différence sexuelle au fondement du mariage et de la filiation, de la culture et du lien social. La loi sur l’homophobie votée en France, le 31 décembre 2004, conçue sous la Présidence de M. Chirac et du Premier ministre M. Raffarin, au nom de laquelle on confond et souvent on assimile les insultes inacceptables avec la critique des comportements et des revendications matrimoniales et familiales par des personnes de même sexe avec enfin une réflexion clinique, psychologique et anthropologique sur l’homosexualité. Le conditionnement est tel que bon nombre de personnes répondent aux enquêteurs de ces sondages ce qu’il convient de dire selon les clichés actuels : ne pas paraître discriminant !
Zenit – Iriez-vous jusqu'à déplore une "manipulation" des mentalités ?
Oui, il faut reconnaître que les promoteurs de ce « mariage pour tous » sont des manipulateurs idéologiques puisqu’il y a une incompatibilité entre le mariage et l’homosexualité. Il suffit de voir avec quelle complaisance les médias le valorisent et tentent de présenter en victimes les personnes homosexuelles auxquelles serait refusé non seulement le droit de « s’aimer » mais également celui de se marier au nom de l’égalité des droits. En même temps, les médias traitent avec un certain mépris les opposants comme l’a d’ailleurs fait la Commission parlementaire chargée d’étudier ce projet. On se croirait revenu au temps des pays de l’Europe de l’Est dans le décor du roman le « Zéro et l’infini » d’Arthur Koestler lorsque la fin justifie les moyens.
La façon dont le législateur fait la loi, aussi bien au plan national, européen et international, est inquiétante : on ne part plus des réalités humaines et du bien commun, mais simplement des idées que l’on se fait sur la réalité et qui sont souvent de l’ordre de l’imaginaire. C’est l’imaginaire adolescent qui est au pouvoir dans le monde politique. Il faut faire table rase de tout et au nom du droit positif, inventer de nouveaux droits subjectifs et de nouvelles normes sans tenir compte de ce qui fait loi dans l’humanité, c’est-à-dire le réel (la différence sexuelle est intangible) et la réalité (où ne se réalisent que des besoins et des nécessités). Nous sommes en deçà des œuvres de la raison lorsque la loi devient aussi inique.
Zenit – C’est pourtant une promesse de la campagne présidentielle ?
C’est ce que découvrent actuellement les gens alors qu’ils n’ont jamais voté pour soutenir un projet aussi irréaliste et inutile. La plupart d’entre-eux sont opposés à cette réforme et les autres n’en mesurent pas toujours les conséquences. Il en va de même chez de nombreuses personnes homosexuelles qui n’en veulent pas. Alors à quoi sert cette promesse 31 de la campagne présidentielle ? On notera que progressivement, les promesses faites sont retirées les unes après les autres puisqu’elles sont irréalistes, sauf la 31 que l’on maintient de façon obsessionnelle. La névrose obsessionnelle se noue souvent lorsque l’idée fixe qui encombre l’intelligence fait obstruction à une crainte, plus précisément une crainte imaginaire, que l’on refuse de voir (il faut éliminer le père et la mère du réel ?). Finalement, on peut faire l’hypothèse que ce projet est là pour masquer d’autres problèmes à l’égard desquels les responsables politiques sont impuissants. Tels les médecins de Molière, on crée des idées et un langage compliqués (homoparentalité) pour masquer des problèmes que l’on n’ose pas considérer et encore moins formuler. Une façon de rendre encore plus malade la société qu’elle ne l’est ! On ne joue pas impunément avec des réalités aussi essentielles que sont la différence sexuelle, le mariage et la filiation qui ont mis des siècles à s’affiner symboliquement et juridiquement. Jusqu’à présent, il faut un homme et une femme pour engendrer un enfant, le reste demeure une revendication impertinente.
Zenit – Comment faut-il entendre la notion de « mariage pour tous » ?
C’est une formulation enfantine et irresponsable. Les enfants ne se marient pas entre-eux et on ne se marie pas avec un parent. Donc le « mariage pour tous » est un fantasme œdipien irréalisable. Mais on veut rendre l’impossible œdipien réalisable en jouant au papa et à la maman comme à l’école maternelle pour se donner le pouvoir phallique des parents que l’on n’a pas encore, en croyant au sexe unique freudien et en permettant le mariage à ceux qui ne peuvent pas se marier. Une comptine pour enfant ! D’ailleurs la plupart des personnes qui manifestaient dimanche ne disaient pas vouloir se marier, mais voulaient disposer du symbole pour être reconnues comme tout le monde. On veut voler le symbole comme Prométhée voulait dérober le feu ! Comment la loi civile pourrait-elle compenser un défaut de reconnaissance psychique de soi-même ? Quant à certains anarchistes présents dans des manifestations ou lors de conférences sur la question, ils militent pour le « mariage » entre personnes de même sexe pour mieux détruire le mariage et la famille. Tout un programme qui résulte peut-être d’un conflit inconscient avec les images parentales et la castration ? Dans tout ce méli-mélo sait-on de quoi on parle encore avec des responsables politiques qui ne sont que le porte-parole et le bras séculier des lobbies LGBT.
Zenit – Quels sont les enjeux idéologiques ?
Les enjeux concernent aussi la confusion des sexes dans laquelle nous sommes et des idées issues de la théorie du genre qui privilégie les orientations sexuelles au détriment de l’identité masculine ou féminine. Le mariage est en contradiction avec l’homosexualité. Les personnes homosexuelles ont toujours pu se marier avec une personne de l’autre sexe et certains l’on ainsi vécu. Mais le type de sexualité cultivé entre deux personnes de même sexe (narcissique) n’a rien de commun avec la sexualité entre un homme et une femme (altérité sexuelle) et ne les prédisposent ni à la conjugalité, qui a déjà sa fin en elle-même au titre de la différence sexuelle, ni à la filiation au titre du couple générationnel qu’ils ne constituent pas. Il est important qu’il y ait une cohérence entre l’exercice de la sexualité et la parenté. Il est vrai, répétons-le puisque je l’ai déjà évoqué, la banalisation du divorce, du concubinage, de l’enfant à tout prix font que l’on ne sait plus à quoi correspond le mariage. Qui enseigne le sens du mariage dont l’histoire est fort riche et complexe, et a toujours concerné uniquement un homme et une femme ? Qui enseigne et soutient le sens de la famille ? Certainement pas les pouvoirs publics qui depuis de nombreuses années ont abandonné la politique familiale au bénéfice de mesures sociales et qui ont comme seule obsession l’éducation sexuelle qui s’annonce dans les écoles avec pour thèmes: la théorie du genre pour casser les modèles masculin et féminin dès l’école maternelle, repérer et aider des enfants et des adolescents avec des tendances homosexuelles ou autres, la contraception, l’avortement, la standardisation des orientations sexuelles et la normalisation de l’homosexualité. Une éducation qui se fera en dehors des parents puisque les experts affirment qu’ils sont incapables de libérer leurs enfants au bénéfice d’une nouvelle définition de la sexualité. Une sexualité et une filiation qui doivent se détacher du corps comme l’affirmait dans une tribune Mme Vallaud-Belkacem (Le Monde 13 décembre 2010) : « Ce n’est pas le fait de porter un enfant qui fait d’une femme la mère de cet enfant, mais le fait de le vouloir, de s’engager à l’élever et de s’y préparer … ». Elle ne serait donc pas déjà la mère de l’enfant ? Une affirmation douteuse proche des théoriciens du genre et des militants de l’avortement alors que la mère commence à exister non seulement dans son désir d’être mère mais aussi dans le fait de porter son enfant, de se découvrir mère et de l’accepter le plus souvent même si elle ne l’avait prévu : elle a au moins le mérite de reconnaître l’autonomie de l’existence d’un enfant à naître. Ce sont ainsi des idées inversées qui vont être le socle de la propagande sexuelle à l’école en désincarnant la sexualité.
Zenit – Les responsables politiques ont fait part de leur intention de renforcer par cette loi le sens de la famille…
Mais de quelle famille parle-t-on ? Le ministre de la famille affirme (Journal du Dimanche 27 janvier 2013) : « On ne touche pas à la famille, on la renforce » se faisant elle contredit le ministre de la Justice et Garde des Sceaux qui avait dit « il s’agit d’un changement de civilisation » (20 Minutes.fr, 7 novembre 2012) en définissant le mariage et la filiation à partir de l’homosexualité. Que penser des écarts de langage entre toutes ces affirmations médiatiques ? Sait-on encore penser la famille ? Nous sommes plutôt devant un grave déficit de la pensée qui se contente d’enregistrer des phénomènes sociologiques pour les légaliser (cf. le discours de la sociologue Irène Théry) : puisque le fait existe, la loi doit le reconnaître. Nous sommes dans la justification des comportements les plus divers, mais qui finalement ne peuvent pas contribuer au lien social et à sa vie économique. Telles sont les limites du droit positif.
La loi ne va donc pas renforcer la famille, mais elle va participer à l’éclatement de la famille en tribus qui n’auront rien de commun. D’ailleurs, il est prévu trois types de livret de famille : l’un pour les couples formés par un homme et une femme, un autre pour les personnes de même sexe qui ont des « enfants » et enfin un autre pour les duos de même sexe qui n’ont pas d’enfant. Une organisation administrative éclatée à l’image de la psychose où le réel se confond avec l’imaginaire. De ce fait, la loi vient briser les solidarités naturelles. Une loi dans laquelle de nombreux citoyens ne se reconnaissent pas et ne peuvent donc pas l’estimer. La loi pour être respectable doit être authentique pour organiser des réalités essentielles de la vie humaine et de la vie sociale. Elle sera une loi qui divise et qui n’a aucune valeur sur le plan social. Lorsqu’une loi vient simplement justifier des mœurs et des modes de vie passager, elle n’est pas structurante et affaiblit le cadre porteur. Le « mariage pour tous » est un délire social au moment où l’on perd de plus en plus le sens de la famille au bénéfice de « familles » à la carte qui sont le symptôme tribal d’une société émiettée et fragilisée.
J’ai entendu des jeunes de 25-35 ans qui vivent en concubinage vouloir se marier au plus vite pour ne pas se marier sous le régime de la nouvelle loi, et surtout de pouvoir être considérées comme père et mère de leurs enfants là où la filiation sera dépréciée et éclatée en parent (au singulier) biologique, symbolique et éducateur. On a entendu dans la Commission préparatoire au « mariage pour tous » l’idée que la filiation biologique est terminée, place à la filiation sociale pour mettre tous les « couples » et toutes les « familles » à égalité. Pourtant la voie la plus normale est de concevoir des enfants entre homme et femme, et non pas par des moyens artificiels pour justifier le droit à l’enfant et sa marchandisation aussi dans des PMA qu’à travers des mères porteuses.
Zenit – Pourtant, il existe des familles de différents types ?
C’est un fait et très souvent ce morcellement du sens de la famille est à l’origine de problèmes économiques, éducatifs et scolaires que nous rencontrons. Mais peut-on définir la famille à partir des accidents de la vie ou à partir de postures imaginaires et fantasmatiques plutôt qu’en fonction du réel de l’homme et de la femme ?
Dans les propos des ministres, on part ainsi du principe sociologisant qu’il existe différentes formes de familles : traditionnelle, monoparentale, recomposée, homoparentale, etc. en confondant des situations de fait avec la réalité qui définit la famille et ainsi le texte de loi vise à légitimer tous ces groupes et à réduire des « inégalités ». La loi vient surtout fabriquer des injustices supplémentaires. Elle confond le sociologique (aléatoire) avec l’ontologie (durable) c’est-à-dire ce qui fonde et structure la famille. Toutes les appétences affectives ne sont pas fondatrice de famille. La question est également esquivée en proposant un Pacs amélioré ou une Union civile qui aurait les mêmes droits que le mariage mais sans en porter le nom. Devons-nous multiplier la reconnaissance juridique de tout type de relations affectives à n’en plus finir ? Si tel est le cas, cela manifeste une fragilité et une destruction rampante des liens affectifs et des liens sociaux. Il est grave que les pouvoirs publics n’en aient pas conscience. Nous sommes en plein nominalisme (on joue sur les mots pour masquer le réel) en croyant que le « couple » et la « parenté » homosexuels peuvent exister sur le modèle fondateur de l’homme et de la femme. C’est une erreur et une fausse route qui coûtera très cher à bien des égards aux générations futures (cf. La tentation de Capoue). Ce n’est ni un progrès, ni une évolution. Il ne revient pas à la société d’organiser l’homosexualité qui reste une affaire privée et sentimentale qui ne la concerne pas. Seule compte l’alliance des sexes.
Nous ne pouvons pas nous laisser enfermer dans les manipulations du langage Il n’y a pas de famille traditionnelle : il n’y a que la famille qui est potentiellement présente dans la conjugalité au jour où un homme et une femme décident de s’engager dans le mariage. Toutes les situations ne se comprennent qu’à partir de ce fondement. De nombreuses femmes qui sont seules à élever des enfants préféreraient se trouver dans une autre situation et ne tiennent pas à ce que l’on en fasse un modèle parmi d’autres. Nous savons très bien que les séparations à l’origine de la monoparentalité créent la pauvreté économique que des mesures sociales doivent parfois compenser, sans parler des déficiences éducatives qui s’observent à l’école et dans certains comportements asociaux d’adolescents. Quant à l’homoparentalité qui est un faux concept puisque deux personnes de même sexe ne peuvent pas engendrer, elle n’existe pas et ne peut pas se justifier raisonnablement dans l’intérêt des enfants. Nous sommes dans un imaginaire parental sans enracinement dans le réel et la réalité.
Quoiqu’en disent les ministres concernés, c’est bien dans un mensonge social et un mensonge d’État que l’on inscrit des enfants voulus par des personnes de même sexe et conçus de façon médicale, hasardeuse ou artisanale dans une parenté imaginaire et qui est, et qui sera, handicapante au plan psychologique et au plan symbolique si ce système devait se généraliser. Ce n’est qu’à la troisième ou à la quatrième génération que l’on verra apparaître des troubles de la filiation, de l’identité et des psychoses (il faut trois générations pour faire une psychose à l’âge adulte). Le problème n’est pas tant de mettre en doute des qualités éducatives de la part des personnes homosexuelles, mais de considérer la structure dans laquelle des enfants sont engagés en dehors de la différence sexuelle, et de la présence d’un père et d’une mère. Une chose est d’être confronté à ce type de situation minoritaire et une autre est d’en faire un modèle à travers la loi alors que ce cadre ne peut pas être porteur à long terme. Le déni de la différence sexuelle s’accompagne ici du déni du corps. Or l’enfant a besoin de s’enraciner dans une expérience charnelle à partir de la conjugalité d’un homme et d’une femme pour conforter son identité sexuelle et se différencier subjectivement en fonction de ces deux pôles. Le corps à corps vécu à partir des parents homme et femme est une donnée importante dans le développement psychologique. Le rapport au corps avec deux personnes de même sexe ne remplit pas les mêmes fonctions et confine à la confusion des émotions dans l’indifférenciation des sexes. La présence d’un homme et d’une femme est la seule façon d’humaniser la sexualité pour qu’elle s’achemine vers l’altérité sexuelle. Deux personnes de même sexe n’ont ni les compétences psychiques, ni les compétences symboliques pour représenter l’altérité. Elles entretiennent simplement une relation en miroir du même à l’identique. Évidemment ce modèle est à l’unisson de l’ambiance narcissique dans laquelle nous sommes, ce qui nous empêche de voir et de comprendre les problèmes psychologiques dans les générations futures des enfants captés dans cette emprise du miroir. Il est simpliste de croire que ce qui manque dans la « famille » de ces enfants (l’altérité sexuelle), c’est l’environnement qui le compensera en rencontrant des hommes et des femmes : une identification secondaire alors qu’elle doit d’abord s’enraciner dans la famille. Pourquoi en priver l’enfant au bénéfice du narcissisme sexuel de deux adultes ? Les sentiments ne font pas et ne compensent pas tout ! De plus, il ne faut pas abuser des capacités de résilience des enfants (nouvelle croyance des adultes qui se permettent de ne plus être un modèle identificatoire dont les enfants ont besoin) car en ce domaine, il existe malheureusement des inégalités liées à la vie psychique de chacun.
Zenit – Le droit de s’aimer et de disposer des mêmes droits que les autres citoyens sont-ils si critiquables que cela ?
On entendait souvent l’idée : pourquoi refuser un droit supplémentaire accordé à une partie de la population ? Il ne s’agit pas d’un droit supplémentaire mais de changer la structure du mariage à partir de l’homosexualité. On veut mettre de l’égalité là où elle n’existe pas. Nous sommes en train de nier la différence sexuelle dans le mariage et dans la filiation et là où elle n’est pas nécessaire dans la vie sociale, professionnelle et politique on veut l’imposer par la force de la loi et des sanctions financières alors qu’à compétence égale les mêmes responsabilités peuvent être exercées aussi bien par un homme que par une femme.
Les personnes homosexuelles disposent des mêmes droits civiques en France que les autres citoyens. Il n’y a aucune injustice à ce sujet : ils votent, travaillent, peuvent se loger et circulent librement comme tous les autres citoyens. Nous avons entendu lors d’un reportage sur la manifestation en faveur du « mariage » homosexuel un militant dire « nous sommes dans l’illégalité ». C’est non seulement un abus de langage mais aussi une erreur de s’exprimer ainsi puisqu’ils disposent des mêmes droits accessibles à chacun selon sa situation. L’égalité en dignité et l’égalité des citoyens ne fait pas pour autant l’égalité de toutes les situations : le mariage pour tous est impossible. Il n’y a que les adolescents qui croient que tout est possible au nom de la pensée magique. C’est ainsi que s’exprimait une adolescente de 15 ans à la radio (Europe 1 dimanche 27 janvier 2013, journal de 9h00) : « c’est monstrueux de refuser l’égalité et d’empêcher des gens qui s’aiment de se marier ». Et sa mère de dire au journaliste : « Je ne pense pas qu’à son âge, elle maîtrise ce dossier dans son ensemble… ».
La question reste une fois de plus de savoir qu’est-ce que l’amour ? À quelles conditions est-il possible ? Les personnes de même sexe sont-elles dans ces dispositions ? Très souvent en ce domaine on confond l’amour avec les sentiments. Le mariage n’a jamais été la reconnaissance d’une relation « amoureuse » ou « sentimentale », nous assistons avec cette loi non seulement à une régression mais aussi à l’apparition d’un pouvoir de l’État qui se mêle de la sexualité des citoyens pour distribuer des permis et lever des interdits ? Il n’y a pas d’égalité en matière de mariage, encore faut-il être dans des conditions particulières pour se marier et éduquer un enfant. À moins que l’on veuille continuer à transgresser la différence sexuelle et donner crédit à l’idée de façonner un enfant selon ses intérêts : en cela, ce désir est incestuel.
Qu’on le veuille ou non, en reprenant les catégories des orientations sexuelles à la mode aujourd’hui au détriment des deux seules identités sexuelles qui existent (l’homme et la femme), la société ne peut-être qu’hétérosexuelle. Le mariage exprime l’alliance des sexes là où des duos de même sexe, s’ils se « mariaient » ne représenteraient que l’unisexualité. L’égalité en ce domaine du mariage et de la filiation n’existe pas. Le mariage et la famille restent le fait d’un homme et d’une femme. Ils ne peuvent pas être instrumentalisés pour valider socialement l’homosexualité et renforcer le déni de la différence sexuelle. Inscrire dans le Code civil une chose et son contraire ne peut qu’affaiblir le lien social.
Mais le problème de fond que l’on n’ose pas aborder est bien celui de la légitimité de l’homosexualité (cf. Le règne de Narcisse) qui reste une réalité psychique particulière et sur laquelle il conviendrait de s’interroger pour savoir ce que représente cette forme de sexualité qui n’est en aucun cas une alternative à l’hétérosexualité. Le fait de l’avoir retirée de la liste des maladies mentales et de l’avoir dépénalisée, ne règle en rien le problème. Mais le slogan répété en boucle de l’homophobie inhibe la réflexion et paralyse bon nombre de gens devant cette nouvelle terreur. Le conditionnement exercé par les groupes militants, le pouvoir politique et les médias fait que l’homosexualité serait devenue le modèle supérieur de « l’amour » et de l’accueil des enfants parce que les hommes et les femmes divorcent et sont parfois méchants avec les enfants et que « les homos, eux au moins ils les désirent vraiment les enfants ». Devant ce nouvel idéalisme romantique et désincarné (c’est un système qui est en cause pas les personnes homosexuelles qui d’ailleurs ne se reconnaissent pas en lui), les gens ne savent pas quoi répondre, se taisent ou disent ce qu’il faut dire pour être comme tout le monde. Le conformisme des mentalités est terrible. Nous savons à quoi il peut mener surtout lorsqu’une société cultive des idées délirantes.
Propos recueillis par Franz Le Guen
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