Ces assises maronites élargies interviennent après le dernier sommet des chefs spirituels qui s'est tenu en avril dernier à Bkerké. Un sommet qui a fait couler beaucoup d'encre dans la mesure où il avait mis en relief le profond clivage qui divise le pays.
Après le synode pour le Liban, le conclave patriarcal maronite, les congrès des patriarches et des évêques, les colloques œcuméniques, toute la collectivité s'était retrouvée pour publier la Charte de l'action politique. À la lumière de l'enseignement chrétien comme de la spécificité libanaise. Cette proclamation s'était faite à l'issue d'un congrès organisé à Dbayé en mars 2009. Le manifeste met l'accent sur la préservation de l'entité, les valeurs de civilisation, la neutralité dans les conflits externes. Il réserve, point capital, l'exclusivité de l'armement aux forces régulières.
Il s'était tenu en juillet 2008 une « Rencontre nationale chrétienne », réunissant notamment le général Michel Aoun, Sleimane Frangié, Élie Skaff, Élie Ferzli, Gebrane Tok, Karim Pakradouni et le Tachnag. Le communiqué final assure que « le Liban est terre des messages célestes, modèle de civilisation fondé sur le dialogue entre les cultures et entre les religions, patrie des libertés. Il observe la déclaration universelle des droits de l'homme, les chartes des Nations unies comme de la Ligue, ainsi que l'Exhortation apostolique. Avec soutien à la création d'un État laïc ». Les participants mettaient en garde contre trois périls : l'implantation ; l'appropriation des terres libanaises par des étrangers ; les augmentations d'impôts sans accroissement de la production nationale. Ils rejetaient l'autosécurité, les protections étrangères et les projets de partition.
La présidence
Tout en affirmant qu'il faut respecter la Constitution et soutenir la promotion des prérogatives de la présidence de la République, symbole de l'unité nationale, gardienne de l'indépendance, de la souveraineté, de l'entente et des libertés publiques, les signataires de ce document insistaient sur la nécessité d'une loi électorale équitable, permettant aux expatriés de voter. Enfin, ils réclamaient une représentation plus juste de la composante chrétienne dans l'appareil de l'État, dans l'administration.
Auparavant, en juin 2008, il y avait eu un sommet spirituel, mais cette fois à Baabda. Pour bien montrer l'entente autour du principe d'État et de république. D'ailleurs, le communiqué final proclame un engagement commun autour de la défense de l'unité de l'État. Ainsi que pour la sauvegarde de la paix civile et de la coexistence. Avec attachement au régime parlementaire démocratique libre. Pour renforcer l'autorité de l'État et sa souveraineté sur la totalité du territoire national. À travers le respect de la formule de la diversité qui distingue le Liban et forge ses particularités nationales. Le texte condamne l'extrémisme et la violence sous toutes ses formes. Il prohibe le recours aux armes dans les conflits. Et rappelle qu'en toute occasion, il faut miser sur l'armée et sur les FSI. Seuls organismes autorisés à défendre la sécurité et la stabilité du pays. Le sommet spirituel invite les Libanais, les forces politiques notamment, à coopérer avec le président Sleiman, à en faciliter la mission, pour dynamiser le pays. Ainsi que pour traiter les problèmes socio-économiques qui accablent les Libanais. Il demande enfin qu'il soit mis un terme aux tiraillements, et surtout aux provocations de nature confessionnelle via les médias.
En novembre 2010, à l'issue d'une rencontre chrétienne tenue sous l'égide du patriarche Sfeir, un « appel pour le Liban » a été lancé. Il y est dit que la présence chrétienne dans la région se trouve menacée par le refus israélien d'une paix juste, ainsi que par l'extension du radicalisme religieux. Le communiqué soutient que la crise aiguë que traverse le pays déborde les conflits d'ordre politique ordinaire pour atteindre le noyau même des options nationales, et attaquer la volonté de la majorité des Libanais, exprimée dans les urnes. La rencontre souligne la gravité de la situation qui découle d'une équation inéquitable, du reste impossible, voulant renier la justice sous prétexte de préserver la paix civile, d'ailleurs sous la menace des armes. Elle prévient que dès lors, le Liban, musulmans et chrétiens confondus, affronte un danger sévère. Les Libanais risquant de connaître le sort d'autres Arabes dont l'État s'est effondré par suite de la domination des radicaux religieux. Elle met en garde contre une explosion locale par contagion, en cas d'affrontements confessionnels éclatant ailleurs. En soulignant la nécessité de revivifier la notion de patrie définitive pour tous et la coexistence, en rejetant les projets de mini-États. Par la suppression de la dualité concernant l'armement, la défense du pays devant incomber aux seules forces régulières de l'État.