Il a eu lieu le 9 mai dernier, sous la houlette de la Commission des Conférences épiscopales d’Europe (Comece), et il a réuni des représentants de plusieurs organismes comme l’ "Aide à l'Eglise en Détresse" (AED), l'ONG "Portes Ouvertes", et l’organisation américaine « Pew Forum on Religion & Public Life », pour analyser la situation des chrétiens au Moyen Orient et en Afrique du nord.
Parmi les intervenants on notait la présence, entre autres de : Mgr Samir Nassar, archevêque maronite de Damas, le P. Pierbattista Pizzaballa, custode franciscain de Terre Sainte à Jérusalem, et Demianos Kattar, ancien ministre des Finances et ministre de l'Economie et du Commerce au sein du gouvernement libanais.
Au cours de son intervention, le P. Pizzaballa, a expliqué en quoi il est difficile d’aspirer à la laïcité en Israël comme dans les pays arabes, où la religion « n’est pas une expérience individuelle » mais « le trait distinctif de chaque groupe qui, en tant que tel, a ses propres us et coutumes, ses traditions et modes de vie ».
« Pour les citoyens, il vaut mieux rechercher un dialogue qui puisse leur permettre d’aspirer à une pleine citoyenneté, indépendamment de leur appartenance religieuse », a-t-il dit.
Mais il ne faut « pas prétendre un changement immédiat », avait effectivement confié à l’AED, juste avant la rencontre, le supérieur des franciscains en Terre Sainte.
Selon lui, ce « printemps arabe » a déclenché deux réactions opposées : un grand enthousiasme et une forte préoccupation, après 40 années de « d’immobilisme » et de « statu quo », de ces régimes dont il est aujourd’hui difficile de sortir : « C’est un processus long et progressif », a-t-il ajouté.
« Nous ne pouvons nous attendre à ce que, après des décennies de gouvernements non démocratiques, le Moyen Orient vive une transformation positive capable de produire des dynamiques sociales sereines », a-t-il commenté.
« Il faut être patient et faire attention à ne pas mettre tout dans le même sac », a fait observer le P. Pizzaballa : « On ne peut généraliser et penser que c’est la même chose dans tout les pays du Moyen Orient, car chacun a sa propre histoire, ses propres caractéristiques et équilibres ».
Cela dit, il est évident, selon lui, que « l’on peut comparer la condition des chrétiens à un papier tournesol pour comprendre quel genre de gouvernement on est en train d’instaurer ».
Le pays qui inquiète le plus le ministre provincial des Frères mineurs est bien entendu la Syrie « où est en cours une guerre civile », et où, bien qu’ils ne soient pas encore un objectif spécifique, « les chrétiens souffrent comme souffre toute la population ».
Le fait d’être minoritaire fait qu’on les prend pour des gens proches des alaouites, la branche minoritaire chiite à laquelle appartient l’actuel président, et donc des partisans de la dictature.
« Les fidèles ont très peur et ceux qui en ont la possibilité quittent le pays », a raconté le père franciscain, qui s’est dit convaincu que « la famille Assad ne survivra pas longtemps », même si la situation est « très fragmentée et ne sera pas résolue rapidement ».
Commentant les déclarations de certains évêques chrétiens soutenant le régime syrien – dont le patriarche grec melchite d’Antioche, Grégorios III Laham – il a estimé que « l’épiscopat doit rester modéré ».
Le P. Pizzaballa a ensuite réaffirmé sa ferme opposition à une intervention militaire dans le pays, qui ne ferait qu’attiser la situation et déclencher de nouvelles violences : « Des impositions de l’extérieur, a-t-il dit à l’AED, créeraient des réactions dans un sens et dans l’autre. Les changements doivent naître de l’intérieur et être mis en œuvre progressivement ».
Dans le processus de transformation des sociétés du Moyen Orient, les chrétiens, a-t-il conclu, sont une « plus-value » : « Nos frères dans la foi sont des pacifistes, bien insérés dans le territoire et avec une grande préparation culturelle. Leur aide contribuera assurément au développement du monde arabe. Mais chaque chose en son temps : la route à parcourir est encore longue ».
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