Reporters sans frontières demande au président Mahinda Rajapakse de rappeler à l’ordre différents ministres dont les propos et les incitations à la violence mettent gravement
en danger des dizaines de journalistes sri lankais."Monsieur le Président, il n’est pas encore trop tard pour freiner ceux qui, parmi vos proches et vos alliés politiques, sèment le trouble et la peur dans la profession journalistique. Les violences exercées par les hommes de main de certains membres du gouvernement jettent un discrédit sur l’Etat qu’il sera difficile d’inverser", a affirmé l’organisation.Dans une interview publiée le 27 janvier 2008 par le Sunday Lankadeepa, Gotabhaya Rajapakse, secrétaire à la Défense et frère du chef de l’Etat, a déclaré : "Les journalistes ne devraient pas être autorisés à écrire sur les affaires militaires et des actions fortes devraient être prises contre ceux qui le font. Nous devrions revenir aux lois qui criminalisent la diffamation pour punir ceux qui tentent de nous assassiner." Le secrétaire d’Etat a également critiqué les groupes de presse indépendants Wijeya et Maharajah.Les hommes de main du ministre du Travail, Mervyn Silva, sont vraisemblablement à l’origine de l’agression à l’arme blanche, le 25 janvier, du journaliste de la chaîne de télévision d’Etat Sri Lanka Rupavahini Corporation (SLRC), Lal Hemantha Mawalage. Il a été pris dans une embuscade tendue par deux individus à moto armés de couteaux alors qu’il rentrait chez lui dans la périphérie de Colombo. Le reporter et son fils ont été obligés de se cacher dans une forêt en attendant l’arrivée de la police. Le journaliste a été hospitalisé pour des blessures aux mains et au corps.Il a confié à plusieurs collègues avoir été menacé de mort au cours des semaines qui ont suivi le coup de force du ministre Mervyn Silva dans le bâtiment de la SLRC, le 27 décembre 2007. Ce jour-là, le ministre connu pour ses propos racistes et ses diatribes contre les journalistes, avait ordonné à ses hommes de main de frapper le responsable de l’information de la chaîne, T. M. G. Chandrasekara. Effrayé par de possibles représailles, ce dernier a récemment demandé à être relevé de son poste.Après cet incident, Reporters sans frontières était intervenue auprès de conseillers du chef de l’Etat pour s’inquiéter des menaces qui pesaient sur les journalistes de la SLRC.
Le 7 janvier, le ministre des Affaires sociales, Douglas Devananda, également chef de la milice progouvernementale EPDP, a accusé les journalistes de l’émission "Minnal" de la chaîne Shakthi TV d’avoir orchestré, sur les instructions de la rébellion du LTTE, une interview qui le mettait en cause.
Un député d’opposition tamoul avait affirmé à cette chaîne être menacé par l’EPDP, quelques jours seulement avant d’être assassiné à Colombo. Douglas Devananda a demandé à la police de lancer une enquête sur les journalistes, notamment Sri Ranga Jeyaratnam. Suite aux propos du ministre, des manifestations ont eu lieu dans le pays pour défendre cette émission en tamoul, l’une des dernières à traiter librement de politique.
Les hommes de main de Douglas Devananda sont également soupçonnés d’être les auteurs des menaces téléphoniques adressées le 6 janvier à la rédaction du quotidien Uthayan de Jaffna. L’appel venait de l’île de Kayts contrôlée par la milice EPDP. Des responsables du journal ont affirmé à Reporters sans frontières craindre pour la sécurité de leurs employés.
Un autre journaliste, Suhaib Kasim, l’un des anciens responsables de la rédaction du quotidien d’Etat en tamoul Thinakaran, a été attaqué le 28 janvier à l’arme blanche à son domicile de Colombo. Les motifs de l’attaque ne sont pas connus.
Reporters sans frontières 29/1/2008