Accompagné du père Estéphane Frangié, le député de Zghorta est arrivé à Dimane dans la matinée. Il a été accueilli dans la cour du patriarcat par Mgrs Francis Bayssari et Fouad Barbour, qui l'ont escorté jusqu'au grand salon où l'attendaient le patriarche Sfeir, les membres de la Ligue et Mgr Samir Mazloum. Joseph Torbey a aussitôt prononcé un petit discours dans lequel il a affirmé que le patriarche est « ouvert à tous les Libanais et plus particulièrement aux maronites ». Il a ajouté que Bkerké constitue une « autorité religieuse, spirituelle et nationale, qui permet à tous de se retrouver autour de ses principes et de ses constantes et qui a toujours traité tout le monde sur un pied d'égalité ». Après avoir rappelé le rôle national des maronites, M. Torbey a affirmé qu'il n'y a pas d'avenir sans des choix judicieux et la solidarité, tout en respectant la liberté de l'action politique et la rivalité légitime.
Le patriarche Sfeir et le député Frangié ont exprimé leur soutien aux propos du président de la Ligue maronite et tout le monde s'est ensuite dirigé vers le balcon de l'aile privée du patriarche où l'entretien a été suivi d'un déjeuner.
À sa sortie, Sleimane Frangié s'est adressé aux journalistes et a déclaré : « Le patriarche ne nous invite pas, mais nous convoque. Nous avons eu des divergences avec lui sur des questions politiques, mais nous n'avons jamais mis en cause l'autorité spirituelle de Bkerké. C'est pourquoi, les premières paroles que je lui ai adressées étaient : "Monseigneur, vous nous convoquez, vous ne nous invitez pas et vous restez notre première et dernière référence. Notre boycott était simplement politique." À partir de là, nous avons eu une discussion franche sur des sujets politiques en présence des membres de la Ligue maronite et du père Estéphane Frangié. Le patriarche a compris nos positions et nous l'avons aussi écouté. C'est le début d'une novelle route avec Bkerké en politique ».
Le député de Zghorta a insisté sur le fait que l'entretien a été très franc. Il a ajouté que nul ne met en cause la souveraineté et l'indépendance du Liban, mais que chacun l'exprime à sa façon. « Le patriarche nous a permis d'exprimer notre avis et c'est ce que nous souhaitions depuis longtemps », a-t-il ajouté.
Interrogé sur l'éventualité d'une réconciliation interchrétienne, Sleimane Frangié a affirmé que « Joseph Torbey a soulevé cette question et nous avons expliqué que ce n'est pas parce que Samir Geagea et Sleimane Frangié ne s'assoient pas ensemble que les maronites et les chrétiens en général disparaîtront. Il ne faut pas s'arrêter sur ce point. Le général Aoun et Samir Geagea ont parlé ensemble à plusieurs reprises et ils sont restés en conflit. Il est possible d'unifier la stratégie chrétienne de plusieurs manières. Le problème est dans le conflit politique ; quant au contentieux personnel, il est terminé depuis longtemps. Mais dire que les chrétiens ne s'unifieront que lorsque Frangié et Geagea parleront ensemble est de la désinformation contre les chrétiens ».
Le chef des Marada a encore estimé que ce qui compte, c'est de s'entendre sur des constantes chrétiennes. Il a ajouté que « les chrétiens devraient avoir un plan global et complet pour les nominations administratives, étudier chaque poste, son importance, les services qu'il peut rendre à la communauté et aux Libanais et choisir en toute connaissance de cause. Mais s'il s'agit de protester contre la perte pour les maronites du poste de directeur général de la Sûreté, juste pour mettre en difficulté les chiites, alors que les chrétiens perdent en parallèle des postes plus importants, cela ne sert à rien ».
Après avoir démenti avoir évoqué avec le patriarche le dossier des faux témoins, Sleimane Frangié a répondu à une question portant sur les critiques adressées par Michel Aoun au président de la République : « Le général est un allié et un ami et nous appartenons au même bloc parlementaire, tout comme nous avons la même vision de la souveraineté et de l'indépendance du pays. Mais cela ne signifie pas que notre courant est une copie conforme du CPL. Nous sommes ainsi avec le président Sleiman et nous ne le critiquons pas. Le général Aoun a, lui, ses raisons pour le faire. Personnellement, si j'ai des critiques à formuler contre le président, je me rendrai chez lui et les lui communiquerai. »
Au sujet de la situation générale dans le pays, le député de Zghorta a estimé que « le Liban traverse une période délicate et nous devons tous nous comporter en hommes d'État. J'ignore où nous mènera l'escalade verbale actuelle. En définitive, nous devrons parler ensemble et trouver un compromis… ».
L'orient le jour
Liban : Frangié : Nous avons ouvert une nouvelle page avec le patriarche
Le chef du courant des Marada, Sleimane Frangié, a répondu hier à l'invitation du patriarche maronite Mgr Nasrallah Sfeir à Dimane, en présence du président de la Ligue maronite, Joseph Torbey, et d'autres membres de la Ligue.
Cette visite intervient après une période de froid entre Bkerké et Bnechii, et selon M. Frangié lui-même, elle ouvre une nouvelle page politique avec le siège patriarcal maronite.