Le ministère marocain de la Communication a annoncé, le 31 octobre 2008, l’interdiction de distribution de l’édition internationale de l’hebdomadaire français L’Express pour "atteinte à l’islam".
Trois jours plus tard, les autorités algériennes et tunisiennes ont appliqué la même décision. Le numéro 2991 de L’Express, daté du 30 octobre au 5 novembre 2008, titrait en couverture "Le choc : Jésus-Mahomet. Leur itinéraire. Leur message. Leur vision du monde". Ce dossier, d’une dizaine de pages, brosse le portrait des fondateurs du christianisme et de l’islam, à quelques jours de la tenue, à Rome, d’une rencontre entre des dignitaires musulmans et catholiques, à l’initiative du pape Benoît XVI, pour "aider au dialogue" entre les deux religions monothéistes.
"Il est regrettable que le ministère de la Communication ait de nouveau choisi d’endosser l’habit du censeur pour faire interdire un journal qui ne fait qu’apporter des éléments de débat sur un sujet d’actualité, ayant un écho important auprès de son lectorat marocain. Cette décision est d’autant plus surprenante que les autorités marocaines n’ont cessé de décrire le royaume comme un lieu historique de dialogue et de coexistence entre les cultures et les religions", a déclaré Reporters sans frontières.
"Il est encore plus regrettable qu’Alger et Tunis aient décidé d’emboîter le pas au Maroc. Le royaume est-il en passe de devenir un exemple de répression de la liberté de la presse dans la région ?", s’est interrogée l’organisation.
Les autorités marocaines se sont appuyées sur l’article 29 du code de la presse les autorisant à interdire des publications "lorsqu’elles portent atteinte à la religion islamique, au régime monarchique, à l’intégrité territoriale, au respect dû au roi ou à l’ordre public". Le ministère de la Communication avait déjà fait usage de cette prérogative à l’encontre de l’hebdomadaire marocain Nichane en décembre 2006, après la publication d’un dossier intitulé "Blagues : comment les Marocains rient de la religion, du sexe et de la politique". Nichane avait été de nouveau saisi en août 2007, aux côtés de son édition francophone TelQuel, suite à la publication d’un éditorial critiquant un discours du roi Mohammed VI. Ce numéro contenait également des articles traitant du "sexe dans la culture islamique".
Selon l’agence américaine Associated Press, les autorités algériennes et tunisiennes ont décidé, le 3 novembre 2008, de censurer à leur tour l’édition de l’hebdomadaire français L’Express.
Le Maroc occupe la 122e place, sur 173, dans le classement mondial de la liberté de la presse, publié par Reporters sans frontières le 22 octobre 2008.
RSF 03.11.2008