Reporters sans frontières condamne les atteintes à la liberté de la presse qui se sont multipliées durant le mois de septembre 2007 au Honduras. Geovanny García, journaliste de la chaîne de télévision locale Hondured, a été victime d’un attentat par balles, le 7 septembre à Tegucigalpa, tandis que Martín Ramírez, du quotidien La Tribuna, a fait l’objet de plusieurs menaces après la publication d’un article sur le crime organisé.
Le 28 septembre, le gérant de l’entreprise publique de télécommunications Hondutel a porté plainte contre six journalistes après qu’ils avaient dénoncé de graves actes de corruption. "La situation de la liberté de la presse reste précaire au Honduras si l’on en juge par les intimidations, les menaces et la multiplication des procédures contre les médias constatées ce dernier mois. Malheureusement, les autorités n’ont donné aucun gage sérieux dans la lutte contre l’impunité et les abus de pouvoir. Nous espérons, bien sûr, que la Commission interaméricaine des droits de l’homme (CIDH) enjoindra au gouvernement d’assurer une protection adéquate aux deux journalistes récemment victimes d’attentat. Mais cette protection ne dispense en rien d’une enquête plus large sur le crime organisé et ses ramifications. D’autre part, l’“atteinte à l’honneur”, reprochée à six journalistes, ne saurait constituer l’alibi pour obliger la presse à s’autocensurer. La justice doit se porter garante de la liberté d’informer", a déclaré Reporters sans frontières. Le 7 septembre 2007, Geovanny García a été visé dans sa voiture par des inconnus qui circulaient sur une moto noire. Ils l’ont suivi depuis les locaux de Hondured et lui ont tiré dessus à sept reprises après l’avoir intercepté. L’une des balles a éraflé la main du journaliste qui a tenté de se protéger en se baissant. Geovanny García avait dénoncé à plusieurs reprises des cas de corruption dans des contrats de revêtement des rues impliquant des fonctionnaires du Secrétariat des travaux publics, des transports et du logement (Secretaría de Obras Públicas, Transporte y Vivienda). Le même jour, Martín Ramírez, de La Tribuna, a publié un article sur les "mareros" (membre des “maras”, gangs de jeunes ultraviolents essaimant en Amérique centrale), et leurs liens éventuels avec la police. Les intimidations téléphoniques contre le journaliste et sa famille se sont multipliées après que des policiers avaient révélé son identité et l’objet de ses investigations. Le 24 septembre, la Commission nationale des droits de l’homme a interpellé la Commission interaméricaine des droits de l’homme (CIDH) pour lui demander de prendre des mesures de protection en faveur de Geovanny García et de Martín Ramírez. Le 28 septembre, Marcelo Chimirri, gérant de l’Entreprise hondurienne de télécommunications (Hondutel), a porté plainte contre Renato Álvarez et Rossana Guevara, de la chaîne de télévision Televicentro, Melissa Amaya et Juan Carlos Funes, de la radio Cadena Voces, Carlos Mauricio Flores, rédacteur en chef du quotidien El Heraldo, et Nelson Fernández, directeur du journal local La Prensa. Il les accuse d’"atteintes à l’honneur" après la publication d’articles concernant des malversations mettant en cause Hondutel et dénoncées initialement par le quotidien mexicain El Universal. Les six journalistes ont reproduit les révélations d’El Universal concernant le détournement d’appels téléphoniques internationaux par l’entreprise hondurienne, ce qui représente d’importantes pertes pour l’Etat. Une organisation américaine, la Fondation Arcadia, aurait des preuves de ce détournement qui met en cause Marcelo Chimirri. Renato Álvarez a déclaré à Reporters sans frontières que ces mesures judiciaires ont pour but d’intimider la presse afin qu’elle ne reproduise plus des informations diffusées par des médias étrangers. "Jamais, en trente ans de carrière, je n’avais perçu autant d’intolérance par rapport aux critiques et à la presse indépendante. Ils veulent nous faire taire pour que nous ne parlions plus des affaires de corruption dans l’administration publique." Au cours des cinq dernières années, plus d’une vingtaine de journalistes ont fait l’objet de plaintes pour des délits “contre l’honneur".
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