Québec: Jacques Berset, agence Apic
« Médias et religion : un risque ou une chance »
Sherbrooke, 5 juin 2007 (Apic) Près de 200 journalistes de tous les continents(3 libanais et 2 Irakiens) ont participé lundi 4 juin à Sherbrooke, à 150 km à l’est de Montréal, à l’ouverture du Congrès mondial de l’UCIP, l’Union catholique internationale de la presse. Les travaux, qui se déroulent durant la semaine à l’Université anglicane Bishop’s de Sherbrooke, portent sur le thème « Médias et religion : un risque ou une chance? »
Cet événement a été ouvert par Mgr André Gaumond, archevêque de Sherbrooke, chef lieu des Cantons de l’Est, une région du Québec marquée historiquement par une présence anglophone, anglicane et protestante. Il coincide avec le 80e anniversaire de l’UCIP, une ONG catholique internationale basée à Genève, et aux 20 ans de son Réseau de Jeunes journalistes.
Dans le contexte d’aujourd’hui, a relevé le président de la Conférence des évêques catholiques du Canada, « tenir aussi longtemps relève presque de l’exploit! » Car dans une réalité changeante comme celle du Québec, marquée par la laicisation et la sécularisation, l’Eglise doit trouver ses marques. En effet, le catholicisme québécois, longtemps hégémonique au sein de la société – il avait la haute main sur le système éducatif, hospitalier et les services sociaux – a été bousculé et laminé par la « Révolution tranquille » des années 60.
Aujourd’hui, sauf pour les personnes agées, dans cette partie du Canada, l’assistance à la messe dominicale ne fait plus partie de l’habitude des gens. Signe des temps : l’enseignement religieux confessionnel sera aboli dans les écoles à partir de septembre 2008. L’enseignement religieux catholique sera remplacé par un enseignement culturel faisant place à toutes les religions. Cet enseignement est pensé lus dans une perspective d’information et de culture que d’adhésion à une foi et à une pratique religieuse, a relevé pour sa part Guy Laperrière, du Département d’histoire de l’Université de Sherbrooke. « C’est un changement fondamental, mais il n’a entrainé à peu près aucune protestation dans la société… »
Pour le professeur de Sherbrooke, la fermeture des paroisses catholiques – un phénomène qui a d’ailleurs touché un siècle auparavant les communautés protestantes – est un mouvement qui s’accélère depuis l’an 2000. « C’est l’un des phénomènes les plus importants et les plus significatifs de ce début de 21e siècle ». Cette tendance a également touché la presse québécoise : avant 1970, les grands journaux de la « Belle province » faisaient encore pour la plupart profession de catholicisme – parfois officieusement, parfois officiellement – ou au moins donnaient leur appui aux valeurs chrétiennes. Auhjourd’hui, note le professeur Laperrière, la grande presse au Québec est pratiquement sécularisée, la religion étant considérée comme une affaire privée.
Abordant le thème du Congrès, c’est-à-dire le rapport actuel entre les médias et la religion, Mgr Gaumond s’est lui aussi demandé si c’était un risque ou une chance. « Nous qui sommes en situation de responsabilité au sein de l’Eglise, il nous arrive parfois de nous poser cette question. Il faut nous convaincre que c’est une chance. Il nous arrive parfois de craindre cependant. Depuis que les grandes entreprises médiatiques sont autant du monde des affaires et du spectacle que de la communication, il faut admettre qu’il y a risque… »
Notons que de nombreux journalistes venant des pays du Sud, notamment d’Afrique, de plusieurs pays d’Asie et d’Amérique latine, mais également d’Europe de l’Est, n’ont pu participer au Congrès de Sherbrooke, faute de visas. La politique du Canada, suite aux attentats terroristes du 11 septembre 2001, est devenue plus restrictive. Mais officieusement, des organisateurs du Congrès de l’UCIP ont rappelé que les autorités canadiennes veillent aussi à endiguer l’immigration clandestine, craignant sans doute que des congressistes ne profitent de l’occasion pour faire défection et s’installer au Canada, comme quelques pèlerins l’ont fait lors de la visite du pape Jean Paul II à Toronto en 2002. (apic/be)