Le patriarche était interrogé par la presse à l’aéroport avant son départ pour une visite d’une semaine à Rome, au cours de laquelle il doit participer à des travaux du Conseil pontifical pour les communications sociales et rencontrer le pape François aux côtés de 14 nouveaux évêques maronites qui l’accompagnent.
« On ne peut jamais dire qu’on peut se livrer à une frappe militaire limitée car nul ne sait ce qui pourrait advenir par la suite », a-t-il ajouté.
« L’essentiel est que le monde entier ait répondu à l’appel et prié avec le pape, chrétiens comme musulmans. Nous remercions le ciel du fait que le sujet a pris une autre tournure et qu’il n’y a pas eu une nouvelle guerre avec davantage de destructions, de morts et de populations déplacées », a-t-il dit, se félicitant de l’accord américano-russe sur les armes chimiques.
« À présent, il faut souhaiter qu’un autre pas soit franchi par la mise en œuvre d’une solution pour le conflit en Syrie par les voies politiques et diplomatiques, par les négociations et le dialogue », a-t-il lancé.
Et de poursuivre : « Le Saint-Père a, depuis son élection, pris des positions très importantes. Il appelle en permanence à régler les problèmes par la négociation et le dialogue. Nous le remercierons sans aucun doute pour son attitude (sur la question syrienne) et son message au G20 réuni en Russie, ainsi que pour la force morale qu’il a exprimée à cette occasion. Il a dit des choses très importantes, comme par exemple que cette guerre en Syrie est une guerre pour le commerce des armes. »
« Assez de tergiversations ! »
Abordant le volet libanais, Mgr Raï a dit : « En ce qui nous concerne à nous, au Liban, nous ne pouvons plus continuer à attendre ce qui va se passer demain. Nous ne pouvons plus accepter de rester dans une situation où il n’y a pas d’État, pas de gouvernement et pas d’institutions. »
« On prétend que l’État est incapable, qu’il ne peut pas nous protéger et que la sécurité privée est nécessaire. Tout cela est une injure à notre dignité nationale. L’État, c’est nous tous réunis. S’il est faible, c’est que nous avons contribué à ce qu’il le soit et le contraire est vrai. Voilà pourquoi nous devons renforcer d’abord les institutions constitutionnelles. Assez de tergiversations dans la question gouvernementale », a-t-il lancé.
« Je m’adresse à tous les protagonistes. Les services de l’État sont présents. La question qu’il faut se poser, c’est de savoir si nous faisons tout ce qu’il faut pour que ces services puissent agir et remplir leur rôle. Chaque fois que nous tergiversons dans l’élaboration d’une loi électorale, que nous ajournons des élections ou que nous permettons aux hommes politiques d’intervenir dans l’administration, l’État va sans doute être faible. »
« Mais il n’est pas vrai que l’armée et les Forces de sécurité intérieure sont faibles, a renchéri le patriarche. Au contraire, nous avons un État fort. Je suis fier de mon Liban, et je suis fier d’un État qui, malgré tout, est en mesure de nous protéger. Le peuple vit, même s’il a mal à sa blessure. Alors, cela suffit de prétendre que l’État est incapable. Que fait-on de la dignité de notre patrie et de notre dignité à tous ? »
« Je respecte tout le monde, mais je dis qu’il est honteux pour nous de saboter l’État de nos propres mains puis de venir prétendre qu’il n’est pas en mesure de nous protéger », a-t-il encore dit, appelant les protagonistes politiques à « abandonner leurs intérêts particuliers, leurs liaisons extérieures et les discours haineux les uns à l’égard des autres ».
Rendant hommage à l’action du président de la République, Michel Sleiman, le patriarche a souligné qu’on pourrait « protéger le Liban par le biais de la déclaration de Baabda ». Il s’était déjà prononcé en faveur de ce document il y a quelques jours, avant son départ pour la Roumanie. « Le Liban neutre peut servir la famille arabe et toutes les composantes libanaises », a-t-il conclu.