Reporters sans frontières est profondément révoltée par l’assassinat de Lasantha Wickrematunga, rédacteur en chef de l’hebdomadaire Sunday Leader, le 8 janvier 2009, par des inconnus circulant à moto.
"Le Sri Lanka vient de perdre l’un de ses journalistes les plus talentueux, courageux et iconoclaste. Le président Mahinda Rajapaksa et ses proches, mais également les médias gouvernementaux, portent une responsabilité directe dans la mort de Lasantha Wickrematunga. Pour avoir incité à la haine contre lui, mais également pour avoir laissé s’installer une impunité scandaleuse dans les attaques contre la presse. Cet assassinat est une infamie qui salit l’image du Sri Lanka, et ne doit pas rester impuni", a déclaré l’organisation qui adresse ses condoléances à sa famille et ses collègues.
"Les victoires militaires dans le Nord ne doivent pas autoriser les escadrons de la mort à semer la terreur parmi les opposants au gouvernement, et notamment les journalistes critiques. La communauté internationale doit tout faire pour que cesse cette vendetta politique", a ajouté l’organisation.
Lors d’un entretien accordé à Colombo, en octobre 2008, à un Reporters sans frontières, le président Mahinda Rajapaksa avait qualifié Lasantha Wickrematunga de "journaliste terroriste".
Dans la matinée du 8 janvier 2009, deux hommes circulant à moto ont suivi Lasantha Wickrematunga, alors qu’il se rendait en voiture à son travail. A l’aide d’une barre de fer, les assaillants ont brisé la vitre du véhicule du journaliste, avant de tirer sur lui à bout portant. Lasantha Wickrematunga a été touché à la tête, au ventre et à la poitrine. Transféré dans un hôpital de Colombo, il est mort quelques heures plus tard. L’attaque s’est produite à environ 100 mètres d’un check point de l’armée de l’air, près de l’un des aéroports de la capitale.
Lasantha Wickrematunga, dont la publication se distingue par son franc-parler et ses investigations sur le terrain des affaires, a été l’objet de nombreuses intimidations ou de plaintes pour "diffamation". La dernière provenait du frère du président, Gotabhaya Rajapakse, qui avait obtenu d’un tribunal que le Sunday Leader soit interdit de parler de lui pendant plusieurs semaines. Egalement avocat, Lasantha Wickrematunga avait expliqué dans un entretien avec Reporters sans frontières que son objectif en tant que journaliste était de "dénoncer la cupidité et les mensonges des puissants". De fait, son journal s’était spécialisé dans les enquêtes fracassantes sur la corruption et les abus de pouvoir au Sri Lanka.
En novembre 2007, un groupe d’hommes armés avait détruit l’imprimerie du groupe de presse Leader Publications, situé dans une zone placée sous haute sécurité, près de Colombo. Lasantha Wickramatunga avait dénoncé auprès de Reporters sans frontières une "opération commando soutenue par le gouvernement". La police n’a procédé à aucune enquête sérieuse dans cette affaire.
Le Sri Lanka est classé à la 165e position – la pire pour un pays démocratique – dans le classement mondial de la liberté de la presse 2008 de Reporters sans frontières. Deux journalistes y ont été tués en 2008 et deux autres professionnels des médias, J. S. Tissanayagam et Vettivel Jasikaran, y sont emprisonnés.
RSF 08.01.2009