Le représentant du patriarche oecuménique Bartholomée Ier au synode voit dans l'exigence de « la liberté religieuse pour tous » une garantie de la « coexistence des cu1tures » des peuples et des religions au Moyen-Orient.
Il a exprimé les voeux de « réussite » de Bartholomée pour le synode des évêques pour le Moyen-Orient et l'espérance que l'assemblée suscite et ne doit pas décevoir : « Nous ne pouvons que nous féliciter de la tenue de cette assemblée spéciale du Synode des Évêques consacré au Proche-Orient. Le monde attend de cette réunion un message fort, que des actes concrets soient posés. Il en va non seulement de la responsabilité de l'Église Catholique en tant qu'elle est l'organisatrice d'un tel Synode, mais bien de chacune des Églises qui participent au titre de «Délégués fraternels», dans la transcendance de nos différences et auxquels il fut explicitement enjoint de prendre une part active à la discussion. »
Renforcer les liens de tous les chrétiens
Plus encore, il souhaite que le synode « renforce les liens unissant tous les chrétiens de la région, avec clarté, courage et amour ». Il identifie le danger de « paternalisme exagéré à l'égard des chrétiens d'Orient » et le remède : se mettre « à l'école de leur réalité ».
« Il est donc de notre devoir, pour ne pas dire de notre responsabilité, que ce Synode ne soit pas relégué à la longue liste des rencontres sans lendemain, tout au moins par respect pour ceux qui souffrent et par engagement à l'égard de notre foi », insiste le Métropolite.
Il a aussi exprimé sa perception du christianisme – souffrant – au Moyen-Orient : « Le Moyen-Orient intrigue tout comme il fascine. Il est la propriété de tous et ne souffre pas l'exc1usivité. Terre sacrée, elle est d'autant plus sainte que, pour nous chrétiens, c'est dans cette région du monde qu'il a plu à Dieu de nous offrir la plus incroyable des promesses, celle de la Résurrection. Cette terre, premier témoin à travers les âges de l'oeuvre salvifique du Christ, participe néanmoins de ce que le penseur Pascal décrivait comme son agonie à travers les âges. En effet, l'actualité ne cesse de nous rappeler les divisions, les séparations, les souffrances quotidiennes auxquelles certaines franges de la population sont soumises, et, au premier titre desquelles les chrétiens de la région ».
Pour que les chrétiens demeurent
Le métropolite orthodoxe a également insisté sur « deux axes essentiels » : « la disparition progressive du christianisme au Moyen-Orient » et les « capacités de dialogue avec les autres composantes religieuses de la région » et en particulier avec « nos frères musulmans et juifs ».
Evoquant tout d'abord l'émigration, le Métropolite de France s'interroge : « Comment pérenniser la présence des chrétiens dans la région au vu de nos dialogues bilatéraux ? » Il voit la réponse à ce défi dans l'union des chrétiens : « Une union garantirait la pérennisation de la présence chrétienne localement ».
Pour S. Em. Emmanuel, le document de travail du Synode, « l'Instrumentum Laboris », publié par Benoît XVI lors de son voyage à Chypre, en juin dernier, constitue un « signe adressé non seulement aux orientaux catholiques, mais aussi à l'Église Orthodoxe et à ses fidèles ».
Il rappelle « l'importance de la présence orthodoxe à l'intérieur des sociétés orientales », et le « pluralisme » qui caractérise ces sociétés, souhaitant le progrès des « initiatives de dialogue » et des « coopérations nécessaires et utiles pour le bien d'un plus grand nombre et la transmission efficace du témoignage évangélique ». Il évoque à la fois « les bonnes relations » actuelles des Églises, et « l'espoir tangible d'une prochaine union » qui doit avoir « un effet catalyseur ».
Ensuite, pour ce qui est des « capacités de dialogue avec les autres composantes religieuses de la région et en particulier avec nos frères musulmans et juifs », le Métropolite recommande, devant ce qu'il appelle « l'inflation des initiatives que connaît de nos jours le dialogue interreligieux », de veiller à ce que ce soit « l'ensemble de la société » qui perçoive davantage « la nécessité d'un vivre ensemble dans la paix ».
Pas de « choc des civilisations »
« Le Moyen-Orient, fait observer le Métropolite, doit invalider la thèse du choc des civilisations ». Au contraire, il affirme cette espérance qui doit venir du terrain : « Oui, un vivre ensemble est réalisable, selon des modalités qui ne seront pas dictées par des tiers, mais bien par ceux qui y vivent au jour le jour » : « c'est eux, insiste le Métropolite Emmanuel, qui constituent « le sel de la terre ». »
Et pour que cela se réalise, il rappelle la nécessité de la liberté religieuse : « La première condition inaliénable pour toute cohabitation demeure la garantie de la liberté religieuse pour tous. Sur cette base seulement les relations entre les religions, les peuples et les cultures seront en mesure de favoriser l' émergence de ce que Lévi-Strauss appelait: « la coexistence de cu1tures offrant entre elles le maximum de diversité ».