alors que le ministre de la Justice, Tsang Yung-fu, vient d'annoncer qu'une nouvelle série d'exécutions capitales auraient lieu d'ici quelques semaines, rapporte « Eglises d'Asie », l'agence des Missions étrangères de Paris.
L'actuel président de Taiwan, Ma Ying-jeou, avait pourtant confirmé il y a moins d'un mois que le gouvernement avait décidé de réduire le nombre des exécutions en attendant que s'apaisent les tensions au sein de la société taiwanaise sur cette question très controversée.
Membre actif depuis près de 15 ans de l'Association catholique chinoise des aumôniers de prison, Cheng Tao dénonce le principe sur lequel est établi le système judiciaire et pénal à Taiwan. A la dissuasion fondée sur la sanction (la peine de mort), il oppose la possibilité de donner « une seconde chance » aux détenus « qui, de plus, sont nombreux à se repentir de leurs crimes durant leur emprisonnement ».
Soulignant qu'il n'est pas rare en outre, que soient prononcé des condamnations totalement injustes par les tribunaux, le militant catholique de 71 ans ajoute qu'il est d'autant plus impensable d'avoir le pouvoir de « décider de la vie ou de la mort d'une personne ».
L'abolition de la peine de mort est un sujet très sensible à Taiwan dont la majorité des habitants (environ 80 %) sont convaincus de l'efficacité de la loi du talion pour réprimer la criminalité, selon le principe « oeil pour oeil, dent pour dent ». Les « abolitionnistes », essentiellement des chrétiens ( presbytériens et catholiques) ou des bouddhistes, ne rassemblent que 12 % de la population. Taiwan est l'un des vingt-huit pays de par le monde à maintenir la peine de mort dans son Code pénal. En 2000, le pays a connu dix-sept exécutions capitales, un chiffre tombé à trois en 2004, avant que ne soit établi un moratoire de fait pendant une courte période de 2005 à 2010.
En janvier 2005, les chrétiens avaient salué le vote par le Yuan législatif (Parlement) d'un amendement au Code pénal excluant du champ d'application du châtiment suprême, les mineurs et les personnes âgées de plus de 80 ans. Mais l'élection en mai 2008 du président Chen Shui-bian, signant le retour au pouvoir du Kouomintang, avait amené rapidement un raidissement de la politique sécuritaire et un retour au dispositif pénal passé.
Le 11 mars 2010, la ministre de la justice, Wang Ching-feng, annonçait sa démission, refusant de signer les décrets d'exécution capitales que lui demandait le gouvernement. Tsang Yung-fu, un fervent partisan de la peine de mort, la remplaçait rapidement, inaugurant son mandat en ordonnant l'exécution de quatre condamnés, moins de trois semaines après sa nomination.
Avec cinq autres condamnations à mort prononcées au cours de l'année 2010, le nombre des détenus en attente dans le couloir de la mort est monté aujourd'hui à 45, parmi lesquels onze d'entre eux ont fait appel de leur jugement.
En avril 2010, alors que la polémique sur la reprise des exécutions battait son plein, la Conférence des évêques catholiques de Taiwan (dénommée officiellement Conférence épiscopale régionale chinoise), publiait une déclaration où elle réaffirmait clairement son opposition à la peine de mort et sa conviction que ce châtiment suprême ne pourrait en aucun cas résoudre le problème de la criminalité.
Appelant la société taiwanaise à prendre conscience de la « dignité et du caractère sacré de la vie humaine », les évêques catholiques insistaient sur le fait que seul un changement des mentalités et des valeurs transmises étaient à même de réinstaurer l'harmonie sociale et de faire accepter la nécessité de l'abolition de la peine capitale.
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