La grande nouvelle de ce mardi a été le cours du pape Benoît XVI lors de la session du matin du synode des évêques, explique le P. Thomas Rosica, attaché de presse du synode sur la Parole de Dieu pour la langue anglaise, dans cette nouvelle chronique sur le synode. Nous publions ci-dessous de larges extraits de cette chronique.
Après les interventions de cinq minutes chacune des 11 premiers cardinaux et évêques, a retenti le solennel « Fiat intervallum ! » que nous avons fréquemment entendu ces dix derniers jours.
… l'expression « Fiat intervallum » annonce l'espresso ou le capuccino tant attendu et bien mérité après les heures passées assis à écouter les interventions dans la salle du synode…Benoît XVI enseigneTout de suite après l' « intervallum », nous avons regagné la salle du synode. Mgr Eterovic nous a alors informés que le « président » du synode souhaitait s'adresser à nous, le président étant le Saint-Père ! Le pape Benoît XVI s'est installé à sa place habituelle, a mis ses lunettes de professeur, ouvert son carnet de notes et s'est adressé à l'assemblée synodale.
Tous les participants sans exception sont « ressuscités » et ont fixé leur attention sur le pape, y compris le personnel du synode, les secrétaires, les « coursiers » et bien sûr les cinq attachés de presse. Nous n'avions reçu aucun texte pour cette leçon. Le pape lisait tout simplement ses notes écrites à la main dans son carnet. Joseph Ratzinger le professeur était là, devant un échantillon de l'Eglise universelle, assis au milieu de ses étudiants, disciples et collègues, partageant ses réflexions sur ce qu'il avait vu et entendu pendant la première semaine du synode des évêques…
Il a parlé de l'importance de la méthode historico-critique qui s'est développée à partir de Jean 1, 14, le Verbe fait chair. Il nous a parlé comme un père et un maître, en rappelant à l'assemblée l'importance des études bibliques qui reflètent l'unité de toutes les Ecritures ; des études faites dans la tradition vivante de l'Eglise et découlant de cette tradition. Notre exégèse et notre analyse de la parole de Dieu doit toujours avoir une dimension théologique car il ne s'agit pas simplement d'un livre d'histoire concernant le passé mais de la Parole qui est vivante dans la communauté de l'Eglise : une Parole qui est Jésus.
Dans un style simple et extrêmement clair, le pape Benoît XVI a affronté l'un des thèmes importants, évoqué très souvent au cours de ce synode : comment combler le fossé entre ceux qui ont déformé l'étude et l'interprétation de la Parole de Dieu et séparé leurs études des Ecritures et leurs analyses bibliques, de la théologie et de la communauté vivante de l'Eglise…
L'une des plus grandes qualités du pape Benoît XVI est sa capacité d'enseigner des choses extrêmement complexes, avec simplicité, clarté et beauté. Ce matin, Benoît XVI était un maître qui déroulait pour nous le rouleau de la Parole vivante de Dieu et nous montrait comment aborder humblement cette Parole, apprendre de cette Parole et la vivre. Nous avons reçu un cours simple et clair sur l'unité entre les Ecritures et la théologie, d'un homme souvent appelé le « Mozart des théologiens ».Jésus sur la route d'EmmaüsLors de nos briefings quotidiens, les journalistes chargés de couvrir le synode demandent souvent quelle est la phrase de l'Ecriture ou le passage qui revient le plus souvent dans les interventions des pères synodaux. Je réponds sans hésiter : l'évangile des disciples d'Emmaüs (Lc 24, 13-35)… Cette histoire est un excellent modèle ou paradigme pour la catéchèse, l'enseignement, les études bibliques et surtout la vie chrétienne…
… Cléophas et son compagnon quittent la ville où se sont déroulés les événements décisifs et font route vers un petit village sans importance. Ils n'ont pas cru au message de la Résurrection à cause du scandale de la croix. Perplexes et découragés, ils sont incapables de voir une libération dans la mort, le tombeau vide, ou le message concernant les apparitions de Jésus aux autres. A leurs yeux, ou la mission de Jésus a complètement échoué, ou ils ont eux-mêmes été profondément déçus par rapport à ce qu'ils attendaient de Jésus.
Alors que les deux disciples accablés faisaient route avec Jésus sur la route d'Emmaüs, leur cœur a commencé à brûler au-dedans d'eux-mêmes à mesure qu'ils comprenaient avec leur intelligence la vérité sur la souffrance du Messie. Au cours du repas à Emmaüs, ils ont fait l'expérience de la puissance de la Résurrection dans leur cœur. La solution au problème de ces deux disciples n'était pas une réponse parfaitement logique.
… Pour comprendre la Résurrection, il faut à la fois connaître le message des Ecritures et faire l'expérience de celui dont parle toute l'Ecriture : Jésus le Seigneur, à travers le geste de rompre et de partager le pain avec la communauté des croyants. L'histoire d'Emmaüs nous dit qu'avant d'être une question de théorie et d'intelligence, la Résurrection doit être vécue dans le cœur…Emmaüs et le synode : un voyage de la tête au cœur Le thème du voyage de l'histoire d'Emmaüs (et on pourrait dire aussi de ce synode sur la Parole de Dieu) n'est pas seulement une référence à la distance entre Jérusalem et Emmaüs. C'est aussi le voyage douloureux et progressif des paroles qui doivent descendre de la tête vers le cœur ; d'une découverte de la foi, d'un retour à une véritable relation avec l'étranger qui n'est autre que Jésus le Seigneur.
Le voyage de Cléophas et de son compagnon, lors de cette première Pâque, a été un processus graduel et douloureux consistant à se remémorer et à resituer les événements de l'histoire du salut présents dans les Ecritures, en faisant en parallèle une expérience du Seigneur ressuscité. C'est aussi le cas des chrétiens du XXIème siècle qui continuent aujourd'hui d'interpréter les Ecritures, et de passer d'une connaissance imprégnée de foi à une proclamation et une expérience vécue de Celui qui est vraiment ressuscité des morts. Est-ce si étrange que cette histoire de l'Evangile ait été citée si souvent pendant ce synode sur la Parole de Dieu dans la vie et la mission de l'Eglise ?
P. Thomas RosicaLe P. Thomas Rosica est expert en Ecritures Saintes et professeur d'université, il est également directeur général de la Fondation catholique Sel + Lumière Média, télévision catholique canadienne, et membre du Conseil général de la Congrégation de saint Basile.
ROME, Mercredi 15 octobre 2008 (ZENIT.org)