Au fil des 124 interventions (sur 173 pères synodaux présents) entendues durant cette première semaine, mais surtout des très nombreuses interventions libres, tous les jours de 18 heures à 19 heures, en présence du pape, c’est l’éventail des passions, peurs et ressentiments des catholiques du Moyen-Orient qui s’est déployé.
Au premier rang des préoccupations : la liberté de conscience et de conversion. Avec quelle fermeté la réclamer ? La réponse du cardinal français Jean-Louis Tauran, président du Conseil pontifical pour le dialogue interreligieux, a fusé : « Ne soyons pas timides pour réclamer non seulement la liberté de culte, mais la liberté religieuse. La société et l’État ne doivent ni contraindre une personne à agir contre sa conscience ni l’empêcher d’agir selon sa conscience. »
La nécessité de s’exprimer d’une seule voix
Ne mettant pas en cause l’islam lui-même, les catholiques souhaitant soutenir en son sein les efforts réformateurs, il vise les régimes répressifs qui s’en réclament. De même que des voix se font entendre pour différencier la relation avec l’État d’Israël du dialogue judéo-chrétien.
La communion entre les Églises catholiques orientales, dont l’antithèse serait l’« ethnicisme », évoqué par certains, suscite des réactions diverses selon les générations. Les plus âgés chantent les bonheurs de leur diversité liturgique, rituelle, catéchétique.
Tandis que les plus jeunes appellent à un catéchisme commun, voire à des séminaires partagés. Beaucoup s’accordent à reconnaître, dans des contextes différents, la nécessité de s’exprimer d’une seule voix. Par exemple, Mgr Guy-Paul Noujaïm, évêque maronite auxiliaire de Sarba (Liban), constate dans son (petit) diocèse au nord de Beyrouth l’existence de cinq évêques catholiques !
Autre question ouverte, au plus haut niveau : la primauté du successeur de Pierre et les conditions de son exercice. Au fil de la semaine, des voix se sont fait entendre pour affirmer la prééminence historique des patriarches sur les cardinaux, titre purement latin.
Exil alarmant des catholiques du Moyen-Orient
Ces patriarches devraient, pour certains, être membres ipso facto du collège des cardinaux électeurs, alors qu’aucun n’en est membre aujourd’hui. Plus profondément, le cardinal William Levada, préfet de la Congrégation pour la doctrine de la foi, a ouvert la porte à un examen concerté du ministère pétrinien. Un geste auquel ont été attentifs les orthodoxes présents.
De même les questions soulevées par l’existence d’une diaspora de plus en plus en vaste ont-elles l’effet d’un château de cartes. Des patriarches réclament de Rome la pleine autorité sur leurs ouailles hors de leur territoire d’origine, et donc la reconnaissance de la possibilité pour leur clergé marié d’exercer leur ministère en territoire latin, au grand dam de Rome.
Enfin, parallèlement à l’exil alarmant des catholiques du Moyen-Orient, face auquel plusieurs propositions concrètes ont été faites, l’arrivée massive sur ces mêmes territoires de catholiques asiatiques, pour partie de rite oriental, suscite des défis pastoraux nouveaux.
Frédéric MOUNIER, à Rome la-croix.com |