Le rabbin Alon Goshen-Gottstein explique par une « mauvaise information » les polémiques qui sont nées après l'homélie du Vendredi Saint à Saint-Pierre et il dévoile,
dans le «Jerusalem Post» du 11 avril dernier, où est le vrai « scoop » de cette homélie. Sa réflexion est reprise dans L'Osservatore Romano en italien des 19-20 avril 2010, ainsi que celle d'un responsable juif italien, Guido Guastalla.
C'est la deuxième fois en quelques semaines que le « Jerusalem Post » intervient pour apaiser les polémiques, après la prise de position de l'ancien maire de New-York, Edward Koch.
Pour le rabbin, les polémiques qui ont suivi l'homélie du P. Raniero Cantalamessa, prédicateur de la Maison pontificale viennent d'une « réaction due à une mauvaise information ». Il déplore que les media aient donné de cette homélie une lecture « sensationnaliste » et « volontairement polémique ».
Mais surtout, il souligne certains éléments positif surgis à cette occasion : « En lisant l'homélie en entier, je me suis convaincu, écrit le rabbin, que l'intention du P. Cantalamessa a été mal comprise. Il devient de plus en plus difficile pour les religieux d'envoyer un message pondéré, avec une certaine complexité, des nuances, une profondeur historique et théologique, sans devoir se préoccuper du fait qu'une partie en sera extrapolée pour faire des titres qui sont erronés ».
Au terme de son homélie – centrée sur la dénonciation de la violence faire aux femmes, rappelons-le – le P. Cantalamessa avait cité un ami juif qui lui-même faisait un parallèle entre antisémitisme et les attaques médiatiques contre le pape.
Le rabbin souligne que le prédicateur s'est excusé auprès des juifs qui se sont sentis offensés par le parallèle. Mais, ajoute-t-il, « nous aussi nous devons exprimer des remords de ne pas avoir écouté le message tel qu'il l'a transmis, et d'avoir permis aux moyens de communication de créer une fausse histoire, en perdant la vraie ».
Il a souligné que le P. Cantalamessa « a utilisé le moment dans la basilique Saint-Pierre, en présence du pape, pour souhaiter aux juifs une bonne Pâque » : « Quand était-il jamais arrivé qu'une homélie du Vendredi Saint ait été utilisé pour cela ? Probablement jamais. Pourquoi considérons nous comme évident un tel geste de bonne volonté ? Pourquoi passe-t-on dessus en silence ? », demande le rabbin.
« Penser aux juifs comme à des frères dans la foi, durant la liturgie du Vendredi Saint devant le pape, est le fruit de décennies de travail dans le domaine des relations judéo-chrétiennes. Que cela ait été dit aussi naturellement et aussi spontanément, c'est le vrai scoop », fait-il observer.
« Nous saluer le Vendredi Saint avec des paroles prises dans la Mishnah et citées dans la Hagadah – comme l'a fait le P. Cantalamessa – ne transmet-il pas un message puissant qu'il y a là quelque chose de juste et que nous avons fait des progrès ? »
Un commentaire partagé en Italie, souligne encore L'Osservatore Romano, par Guido Guastalla, conseiller de la communauté juive de Livourne, sur le site en ligne Culturacattolica.it où il avoue avoir lu l'homélie en entier « pour ne pas réagir à chaud aux soi-disant dépêches d'agences et aux simplifications souvent intéressées des journaux comme l'ont fait de nombreux représentants du judaïsme italien et mondial ». Il rappelle que le P. Cantalamessa a consacré son homélie à une réflexion sur le sacré et la violence et la violence sur les femmes.
Il explique que dans le passage de la lettre lue par le P. Cantalamessa à la fin de l'homélie, son ami juif rappelle simplement « l'usage du stéréotype, c'est-à-dire le passage de la responsabilité et de la faute personnelle à la faute collective, quelque chose d'analogue aux aspects les plus honteux de l'antisémitisme ». En outre, la lettre s'achevait sur la conclusion que les deux « Pâques » tout en ayant des « éléments d'altérité – de diversité absolue – vivent dans l'espérance messianique qui sûrement nous réunira dans l'amour du Père commun ».
Guido Guastalla précise que dans la prédication du P. Cantalamessa, « le terme Shoah n'apparaît pas », mais comme il a été utilisé dans les journaux, les interviews, etc, l'expression « les aspects les plus honteux de l'antisémitisme » est devenu «Shoah ». Il fait observer « qu'aucune logique – aristotélicienne ou la logique analytique de 1900 – ne permet un tel saut logique ».
Anita S. Bourdin