Avant même le procès des fidèles de Thai Ha, le Tribunal populaire demande un supplément d'enquête, rapporte « Eglises d'Asie », l'agence des Missions étrangères de Paris (EDA).
Un coup de théâtre étonnant vient de se produire au cours des préparatifs du procès des fidèles de la paroisse de Thai Ha. Le 24 octobre 2008, le parquet populaire du district de Dông Da (Hanoï) avait dressé et rendu public l'acte d'accusation contre les huit fidèles de la paroisse de Thai Ha (1). Ceux-ci avaient été arrêtés et inculpés pour leur participation à la transformation en sanctuaire marial du terrain accaparé par le gouvernement, le 15 août dernier. L'acte d'accusation du 24 octobre ne retenait contre eux qu'un seul chef d'inculpation à savoir « troubles de l'ordre public ». Or, le 28 octobre suivant, on apprenait que le Tribunal populaire du district de Dông Da avait retourné le dossier au Parquet populaire du district, alléguant que l'acte d'accusation avait omis la mention d'un délit de « destruction de biens ».
Ce ‘jugement anticipé' porté par le tribunal avant même le procès, a grandement étonné le public vietnamien concerné par l'affaire. Selon le droit vietnamien, le tribunal ne peut juger qu'en s'appuyant sur l'acte d'accusation du parquet. Ce n'est que lors du jugement lui-même qu'il eût été possible de demander un supplément d'enquête. Certains ont aussitôt pensé à une intervention du pouvoir politique, mécontent de la « légèreté » des griefs retenus contre les fidèles qu'il considère comme impliqués dans une affaire grave.
Ce n'est d'ailleurs pas la première fois que l'inculpation change de motifs. Le 28 août, quand les quatre premiers fidèles ont été arrêtés et inculpés, ils étaient accusés de « destruction de biens ». Plus tard, l'enquête de police, devant la minceur des preuves de ce délit, abandonna cette accusation pour ne retenir que les « troubles à l'ordre public ». Plus tard, entre le 5 et le 17 septembre, la police inculpa encore quatre autres fidèles pour « troubles à l'ordre public ». Le 15 octobre, la police décidait d'abandonner définitivement l'accusation de « destruction de biens publics »…
Le 20 octobre, les résultats de l'enquête policière étaient transmis au parquet, lequel faisait parvenir son acte d'accusation au Tribunal populaire le 27 octobre suivant. Selon des sources en provenance de la paroisse de Thai Ha, les huit inculpés étaient convoqués aujourd'hui, 30 octobre 2008, pour un interrogatoire supplémentaire. Par ailleurs, des proches du pouvoir politique ont confié que le procès de Thai Ha serait mené rondement dans les jours qui viennent et, sans doute, dans une grande discrétion.
Le code pénal vietnamien (1999), traitant du délit de « destruction de biens » à l'article 143, ne distingue pas entre « biens publics » et « biens privés ». Les peines sont infligées en fonction de la valeur du bien détruit et de la gravité du délit. Elles vont de six mois à 15 ans de prison. En cas de gravité extrême, ce délit peut entraîner la prison à perpétuité. Les peines prévues par l'article 245 pour « troubles à l'ordre public » varient en fonction de la gravité et des circonstances des troubles causés. Les délits les moins graves sont sanctionnés par deux ans de rééducation sans internement ou une amende ou encore trois mois à deux ans de prison. Les cas les plus graves sont punis de sept ans de prison.
(1) La photocopie des 21 pages de l'acte d'accusation a été mise en ligne par de nombreux sites et blogs de langue vietnamienne.
ROME, Jeudi 30 octobre 2008 (ZENIT.org)