Dans un premier temps, les manifestants, au nombre de plusieurs centaines, se sont rassemblés devant le siège du Comité populaire de la capitale pour protester contre la spoliation du monastère par les autorités. Le cortège s’est ensuite avancé en bon ordre, brandissant des banderoles portant diverses inscriptions : « Lorsque l’on emprunte, il faut restituer ! », « Nous protestons contre les calomnies et les contrevérités de la télévision au sujet de la paroisse de Thai Ha ». D’autres banderoles, sous le dessin d’une chapelle transformée en lieu de réjouissances pour cadres du Parti, portait l’inscription : « Ne profanez pas les terrains et les propriétés religieuses ! ».
On pouvait lire encore sur l’un des calicots, l’article 70 de la Constitution vietnamienne : « Les terrains des religions sont protégés par la loi ». Tout autour du cortège, de nombreux agents de la Sécurité étaient en faction et des barrières métalliques avaient été installées.
Vers 9h, quelques prêtres parmi les manifestants ont été invités à rencontrer les autorités au siège du Comité populaire. La rencontre a duré une trentaine de minutes. Le reste des manifestants s’est dirigé vers le grand lac de Hanoi, passant devant le siège du journal de la capitale, le Ha Nôi Moi, dont les articles sur l’affaire de Thai Ha avaient été fort agressifs. Sur les berges du lac, des prêtres ont été interviewés par les représentants de la presse internationale (1). Vers 10h 00, la manifestation est passée devant la cathédrale et la statue de la Vierge élevée sur le parvis.
Cette manifestation a, semble-t-il, été improvisée pour réagir au coup de force des autorités municipales effectué dans la nuit du 16 au 17 novembre. Le 16 novembre dans la journée, la paroisse avait été avertie de l’éventualité d’une initiative des autorités municipales. Cependant, les responsables n’avaient pas jugé nécessaire de bouleverser le programme de la vie quotidienne de la paroisse et les deux messes prévues avaient été célébrées. Mis au courant, après la célébration des messes, de nombreux fidèles étaient restés sur place, d’autres étaient venus offrir leur aide aux religieux. Une nuit de veille avait commencé.
De fait, dans la nuit du 16 au 17, aux environs de 22h, d’importantes forces de l’ordre composées de policiers, d’agents de la Sûreté, de miliciens, et accompagnés de chiens policiers, étaient mobilisées pour protéger les bulldozers et autres véhicules destinés à des travaux de terrassement préalables à la construction de la station d’épuration. Selon le témoignage d’un paroissien recueilli par Radio Free Asia, un grand nombre de personnalités appartenant au Parti communiste vietnamien (section de la municipalité de la capitale) accompagnaient cette opération policière. De leur côté, de nombreux fidèles de Thai Ha, inquiets, continuaient à venir grossir les rangs des défenseurs de la paroisse. Beaucoup, en effet, craignaient de voir, comme le 3 novembre dernier, des hommes de main de la police s’introduire dans le monastère (4).
Pourtant, quelques jours auparavant, la tension entre les deux parties semblait être retombée quelque peu, grâce à une amorce de négociations. Le 10 novembre, une rencontre avait été organisée, dans un cabinet d’avocats, entre un religieux représentant de la paroisse et un responsable de l’hôpital Dông Da, l’établissement dont le projet de construction d’une station d’épuration d’eaux usées sur un terrain appartenant à la paroisse de Thai Ha à l’origine du conflit avec les religieux rédemptoristes (2). Le religieux avait demandé que le dossier de projet de construction de la station d’épuration soit communiqué pour étude à la paroisse et que la chapelle, à l’intérieur de l’hôpital, ne soit pas utilisée comme lieu de divertissement. Ces demandes semblaient avoir été bien accueillies par la partie adverse (3), mais il ne s’agissait là que d’un faux-semblant.
Dans ses différentes déclarations à Radio Free Asia, le religieux responsable de la paroisse s’est montré soucieux d’éviter toute violence inutile.
Notes
(1) La manifestation a été couverte par des reporters de Radio Free Asia, ainsi que par d’autres agences indépendantes comme Vietcatholic News, VRNs, etc.
(2) Voir dépêche EDA du 16 novembre 2011 : http://eglasie.mepasie.org/asie-du-sud-est/vietnam/hanoi-nuit-de-veille-a-la-paroisse-de-thai-ha-ou-les-autorites-se-preparent-a-entamer-les-travaux-de-construction-malgre-le-refus-des-pretres-et-les-fideles
(3) Radio Free Asia, 15 novembre 2011.
(4) Voir dépêche EDA du 9 novembre 2011 : http://eglasie.mepasie.org/asie-du-sud-est/vietnam/laffaire-de-la-paroisse-de-thai-ha-prend-un-tour-decisif